Il y a 20 ans, décédait Guy Martinet, Français de naissance et Marocain de coeur. Hommage.

Par Khadija BOUTNI   

Ami du Maroc, Français libéral, historien engagé, chrétien de gauche (1), archéologue passionné, grand voyageur, homme de dialogue, pédagogue professionnel, écrivain dans l’âme… militant pour le rapprochement des peuples… Voilà ce qui se dit en général quand on évoque le défunt Guy Martinet.

Le souci de justice et l’engagement de ce Professeur d’Histoire  ne datent pas de cette période seulement. C’est lui qui en 1952 avait rédigé la lettre des 13 professeurs qui revendiquaient la constitution d’une commission d’enquête concernant le génocide perpétré aux Carrières centrales à la suite de laquelle, il était puni  avec ses camarades.  Mais le plus important disait-il dans une interview publiée en 1995 «nous avons réussi à informer François Mauriac de cette affaire lui, qui se dirigeait à Stockholm pour obtenir le prix Nobel, ce qui a constitué un soutien International à notre cause’’(2).   

En 1953, il était derrière l’action menée par les français libéraux  qui ont exprimé leur protestation contre la destitution du Roi Mohammed V, que Dieu ait son âme.

50 ans après, Guy Martinet rendit l’âme à Montpelier en laissant un testament exprimant son désir d’être enterré ici dans ce pays  qu’il  a aimé jusqu’au dernier souffle.

Le Jour de son enterrement alors que les Marocains et surtout les Casablancais étaient encore sous le choc des événements du 16 Mai 2003 comme si le hasard voulait que le défunt n’assiste pas à ces tristes actes qui vont à l’encontre même des valeurs auxquelles Guy Martinet a dédié son temps, sa vie.

Ce  jour-là les  amiEs de M.Martinet , de différents âges, religions, et tendances idéologiques ont pleuré un de leur fils fidèles, un de leurs camarades dévoués, qui  a respecté leur culture,  participé à leur formation, soutenu leur cause et accompagné leurs rêves.

Feu Abderrahman Youssfi  a dit lors de ses funérailles: « La meilleure reconnaissance  pour ton pays le Maroc pour lequel tu t’es donné corps et âme c’est d’avoir choisi d’y être enterré ».

Le rideau se ferme, je suis à l’église Notre Dame de Lourdes accompagnée de mon bébé  qui tripote dans la poussette  brisant le lourd silence qui baigne le jardin. Autour de moi des visages d’hommes et  femmes en deuil. Je remonte le temps, je me rappelle du jour où j’ai croisé  M.Martinet  à l’aéroport, je l’ai reconnu, il avait un grand chapeau, dans le temps, il avait commencé ses séances de chimiothérapie et je l’ai reconnu malgré le changement physique. Il était touché, j’ai remarqué cela à travers son sourire. Ah si je savais que c’était notre dernière rencontre, je serais restée plus longtemps avec lui…

Nous avons échangé une brève discussion et je m’apprêtais à l’emmener au salon d’honneur, il m’a fait signe qu’il préférait rester à la salle d’embarquement en murmurant sa gratitude. Je l’ai quitté, je ne savais pas que je l’ai quitté définitivement…

(1) Jean Pierre KOFFEL: « Aujourd’hui le Maroc » (23 Mai 2003)

(2) Mémorial du Maroc Tome 6 cité par  Ahmed Kabil dans Le magazine’ « Assoual » Sep.  1995   

                                                  

                           Khadija BOUTNI