Dans une chanson de Georges Moustaki qui s’intitule « Le Facteur » en 1969, la mort du facteur est déjà annoncée d’une façon romantique et qui a fait chavirer les cœurs des plus sensibles. Qui se souvient de cette belle histoire qui a lié un jeune facteur au poète chilien Pablo Neruda ? Cette histoire immortalisée admirablement par Massimo TROISI, qui par soucis de santé, a confié la réalisation de ce bijou à son ami le réalisateur Michael RADFORT.
Ce film raconte une période très précise de la vie de ce poète maudit et exilé dans les années 50 sur une île en Italie. Sa rencontre avec un jeune facteur démuni en termes de culture va marquer un tournant dans leurs vies respectives. Ce facteur – censé être son seul lien avec le monde extérieur – va découvrir un poète d’une grande sensibilité et d’une culture qui lui a coupé le souffle.
Amoureux et souffrant, Pablo va l’aider à trouver le fil d’Ariane afin de le guider dans le royaume de la séduction de la femme dont il est amoureux. C’est grâce aux mots de Pablo et à ce tissage troublant des sentiments exaltés par la poésie que ce jeune homme est arrivé à conquérir le cœur de sa bien-aimée.
Aujourd’hui, personne n’attend le facteur. Pas de lettre à écrire à la main, pas d’enveloppe pour couvrir les mots par un voile de timidité, pas de cartes postales à marquer un moment de plaisir. Tout est inscrit dans l’instantané. Les mots talonnent la vitesse de la lumière. Ils arrivent très tôt dans nos smartphones, dans nos tablettes et dans nos ordinateurs. Les mots dématérialisés, vidés de la temporalité, de la lenteur qui façonnent et cajolent, en les lisant attentivement, en dégustant le goût de cette relation intime et charnelle que procure leur inscription sur la page blanche, en inhalant l’odeur du papier à la recherche du parfum de l’autre.
Est-ce un cri émanant d’un manque ou c’est le retour du nostalgique ? Chaque temps a ces rites et ces pratiques qui deviennent par la suite des souvenirs. Mais il y a ceux qui prennent le soin de rendre le passé vivant en lui apportant une touche du temps moderne. C’est le cas de la Maison d’Edition L’ORMA qui a lancé une collection de livres/lettres/cartes postales en les baptisant « Les Plis ». Ce sont des livres prêts-à-expédier.
Ces derniers livres de petit format, rassemblent des extraits de la correspondance des plus grands penseurs, écrivain.e.s, femmes et hommes politiques. Mais ce qui est innovant dans cette expérience qui s’inspire du passé, c’est la conception de ces livres destinés à être postés, grâce à leur astucieuse jaquette qui se transforme en enveloppe. Les six premiers titres de la collection nous plongent dans l’univers de Virginia Woolf, Jane Austen, Stendhal, Fernando Pessoa, Voltaire et Giacomo Leopardi.
La Maison d’édition L’ORMA, nous invite à marcher sur ce pont qui relie le passé et le présent, à retrouver cette vieille correspondance vouée à la disparition, à envoyer des livres à la place des lettres sous une autre forme originelle et intelligente. Le passé n’est jamais totalement un passé, il peut nous rattraper à tout moment !