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Des voix en Espagne se joignent aux appels internationaux pour inscrire le « polisario » sur la liste des organisations terroristes

La milice de Tindouf rattrapée par ses victimes espagnoles

Les appels internationaux pour classer le « polisario » sur la liste des organisations terroristes se multiplient. Dernier en date: celui qui a été lancé le 10 juin courant par le quotidien espagnol « La Provincia », à l’adresse des Etats-Unis. Dans un article intitulé « Procès contre le Polisario : il n’y a pas de présent sans passé », le quotidien de Las Palmas estime que les connexions avérées du « polisario » avec l’Iran, le Hezbollah et les groupes jihadistes essaimant dans la région du Sahel, ne doivent pas faire oublier les victimes espagnoles du terrorisme de la milice de Tindouf durant la « décennie noire » (70-80). Voici in extenso la traduction intégrale de cet article.

« Procès contre le Polisario : il n’y a pas de présent sans passé »

« Les récentes réclamations au niveau international d’inclure le Front Polisario sur la liste des organisations terroristes des États-Unis ne doivent pas être un simple mouvement de façade. En tout cas, cela devrait être un impératif moral qui commencerait mal s’il commettait l’erreur de ne pas intégrer fermement et sans hésitation son passé sanglant contre des citoyens espagnols.

Entre les années 70 et 80 du XXe siècle, durant ce que l’on a appelé la « Décennie Noire », le groupe a commis environ 300 attentats documentés contre des travailleurs de Phosboucraa et des pêcheurs canariens, andalous, galiciens et basques, selon l’Association Canarienne des Victimes du Terrorisme (ACAVITE).

Ces crimes révèlent des antécédents historiques en matière de terrorisme si évidents que les États-Unis ne peuvent les ignorer en évaluant leur désignation en tant que groupe terroriste. Autrement dit, cette désignation ne serait pas compréhensible sans l’inclusion — même comme substrat principal de la proposition — des actes criminels qui ont constitué cette décennie.

Brahim Ghali lui-même, actuel leader du polisario et ministre de la Défense durant ces années, a coordonné des attaques comme celle de la Croix de la Mer (1978), où sept membres d’équipage espagnols ont été exécutés, et l’enlèvement du Mencey d’Abona (1980), dont le patron, Domingo Quintana, a été retrouvé étranglé avec un drapeau du Polisario attaché à son corps.

Ce ne sont que quelques exemples parmi une infinité, malgré l’oubli politique et médiatique, en particulier aux Canaries. Ces faits, soutenus par des documents judiciaires espagnols et une vaste hémérothèque, démontrent que le groupe a opéré comme une milice terroriste des décennies avant que ses liens actuels avec l’Iran ou le djihadisme sahélien ne soient investigués, et qui sont maintenant avancés comme principal argument pour son inclusion dans la liste mentionnée.

Alors que le sénateur Joe Wilson fait avancer son projet de loi contre le Polisario et que le Hudson Institute, l’un des think tanks les plus influents des États-Unis en matière de sécurité nationale et de politique étrangère, alerte sur les connexions de celui-ci avec le terrorisme, la désignation que ces entités promeuvent est basée sur différents axes :

• Liens avec l’Iran et le Hezbollah : Selon des informations publiées en avril dernier par le Washington Post, des centaines de combattants du Polisario formés par l’Iran ont opéré en Syrie jusqu’à la chute du régime d’al-Assad. De plus, le Maroc a rompu ses relations avec l’Iran en 2018 en raison d’un soutien logistique présumé au Polisario.

• Trafic d’armes vers le Sahel : Le Hudson Institute, dans son étude récente et exhaustive, accuse le Polisario de fournir des armes à des groupes djihadistes, de soutenir le CGRI iranien (Ndlr: Corps des Gardiens de la Révolution Islamique) ou d’avoir des liens avec des groupes extrémistes, menaçant ainsi les intérêts américains.

• Menaces récentes : En janvier 2025, le Polisario a menacé la Mauritanie, par l’intermédiaire de l’un de ses principaux leaders, Bachir Mustafa Sayed, pour avoir collaboré avec le Maroc, ce qui confirme que son modus operandi reste basé sur la coercition.

En fait, Mustafa Sayed lui-même avait déjà fait l’apologie du terrorisme un an auparavant, avec sa rhétorique violente et dangereuse habituelle, incitant les Sahraouis à commettre des actes terroristes contre les intérêts marocains partout dans le Sahara Occidental. Entre autres, ses mots étaient littéralement : « Que chacun convainque trois et sorte pour attaquer, chaque militant doit faire exploser trois ou quatre de ces explosifs chaque nuit dans les villes de Smara, Dakhla ou Boujdour ».

La désignation du Polisario comme mouvement terroriste devrait être un acte de justice transnationale. Inclure ses crimes contre des Espagnols dans le dossier, pour lesquels ils n’ont jamais rendu de comptes devant la justice, renforcerait la crédibilité de celle-ci et servirait en quelque sorte de réparation historique, celle qui leur a été refusée maintes fois dans nos frontières.

Il est impératif de récupérer la mémoire de cette tragédie et de rompre avec les faux récits qui ont contribué à son oubli : le Polisario n’est pas un mouvement de libération enveloppé de romantisme. Ce fut une structure criminelle qui a normalisé la violence contre des civils des décennies avant que le djihadisme n’atteigne le Sahel.

L’administration américaine a une occasion unique : déclarer le Polisario organisation terroriste non pas pour ses alliances avec l’Iran ou le Hezbollah, mais pour les crimes contre des citoyens d’un pays qui a toujours été un allié clé comme l’Espagne. La mémoire de ceux qui sont tombés dans les eaux froides de l’Atlantique ou dans les mines de Phosboucraa exige cette rectification historique. Honorer les victimes nécessite cette décision ».

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