Par Abdelhadi Gadi
Cela fait quelques années qu’on s’est habitué à le voir. Dans les meetings d’abord, après sur les strapontins du parlement, avant qu’il ne s’impose en tant qu’image télévisée. Là encore, on a eu droit à deux séquences. Celle quand il était ministre des AE, pour pas longtemps compte tenu de ce que l’on sait, puis, et surtout, quand il est devenu chef de gouvernement. Lui, c’est, vous l’auriez compris, Dr. Saad Eddine El Othmani. Le chef de gouvernement sortant. On ne va pas re- dessiner le profil. Pas besoin non plus de rebobiner le parcours. L’officiel est sur la place publique. L’officieux est chez les siens.
En revanche, on a eu à découvrir El Othmani. D’abord, quand il fallait débloquer le blocage tissé par son prédécesseur Benkirane, ensuite par le truchement de la gestion de l’après. Or, au cours de cette séquence l’observateur a eu comme l’impression que le patron du parti de la Lampe n’était pas considéré comme majeur. Sinon comment expliquer la présence de Me Ramid qui se tenait comme son ombre dans toutes les photos. Là encore, pas besoin d’aller chercher des explications. C’est, vraisemblablement, dans l’ADN de la tribu: il faut un témoin oculaire qui entend tout. Avec Benkirane, c’était un peu à distance, par feu l’omniprésent Abdellah Baha. Deux âmes sœurs, selon leur entourage !
Abdelilah Benkirane, qui avait driblé El Othmani à un moment donné, aurait aimé jouer le même rôle, voire se vêtir en maître de céans. Sauf que Dr. Saad Eddine, entouré des jeunes loups, a voulu, lui, jouer sa « majorité » du mâture et vacciné.
Les dernières années nous ont révélé, plus ou moins, la nature des jeux et des enjeux. Surtout dans la maison lampiste. A y voir de plus près, le SG du PJD aurait eu plus de mal à gérer les siens qu’autres parties externes. Il mimera toujours son ancien patron en simulant être gêné par des forces occultes qu’il ne nommera jamais. Plutôt recevable puisqu’elles n’existent que dans sa tête.
El Othmani ne le dira jamais. Ses co-partisans non plus. Motus et bouche cousue. Rien d’anormal. La tribu est ainsi faite.
Maintenant qu’on s’approche de la fin du mandat, on avait la faiblesse de croire qu’il changera, ne serait-ce qu’un peu, de registre. Désillusion ! Rien.
Pire encore, il ressort un discours qu’on a cru mort et enterré. Il dit, sans hésiter, que son parti serait dans le viseur du ministère de l’intérieur, qu’on voudrait l’affaiblir, qu’on serait même tenté de l’anéantir. Une manière comme nulle autre pour quémander la compassion, greffée à l’indulgence, des électeurs.
D’autre part, lui et les siens sortent la grosse surprise. La cerise du gâteau de fin mandat. Les Marocains qui croyaient qu’il y avait une frontière infranchissable, voire un clivage indiscutable, entre le PJD et le PAM se sont trompés. Sur toute la ligne. En tablant sur une coordination à approfondir, les deux formations ont paraphé un MoU, plutôt mou !
Pour calmer la colère de certains des siens, le chef de file des islamistes Marocains dira, à qui veut l’entendre, qu’il ne s’agit nullement d’une alliance, mais d’entente sur le principe de la coordination. De quoi refroidir les ardeurs du patron du PAM qui n’a eu de cesse, depuis sa prise du volant du parti du tracteur, de faire des appels du pied aux Lampistes.
Pour renvoyer la balle au fond du court, Abdellatif Ouahbi, parce que c’est de lui qu’il s’agit, avancera que sa formation reste ouverte à tout le landerneau politique sans exclusivité.
Que comprendre ? Attendre que les idées des uns et des autres soient un peu moins floues. Il n’y a pas de devin dans la classe. A moins de la jouer politique-fiction adossée à la gymnastique des probabilités !
El Othmani, qui déclare avoir la conscience tranquille, nous réserve bien des surprises. Tout comme tous les autres acteurs de la scène politique.