Trois prisonniers d’opinion algériens en grève de la faim pour dénoncer une détention arbitraire, ont été transférés mardi au Centre hospitalier universitaire Mustapha Pacha à Alger, suite à la dégradation de leur état de santé, selon leurs avocats.
Après plus d’une semaine de grève de la faim, déclarée ouverte le 27 décembre passé, l’état de santé de ces activistes du « Hirak », Mohamed Tadjadit, Nouredine Khimoud et Abdelhak Benrahmani, « s’est beaucoup détérioré », ce qui a entraîné leur transfert de la prison d’El Harrach dans laquelle ils se trouvent depuis plus de quatre mois à l’hôpital, ont précisé leurs avocats dans des déclarations à des médias locaux.
« Ils sont très fatigués », ont ajouté ces avocats qui indiquent avoir introduit une demande de pourvoi en cassation après la prolongation de leur mandat de dépôt, notant qu’une audience avec la chambre d’accusation du tribunal de Bab El Ouad est prévue pour mercredi.
Ces prévenus, qui sont sous mandat de dépôt depuis le 27 août dernier, sont poursuivis notamment pour « publications pouvant porter atteinte à l’unité nationale », « outrage à corps constitué », « atteinte à la personne du président », « atteinte à la sécurité et à l’unité nationale » et « exposition de la vie d’autrui au danger en incitant à un rassemblement pendant la période du confinement ».
Selon un décompte établi lundi par le Comité national pour la libération des détenus (CLND), près de 90 détenus politiques et d’opinion croupissent dans les prisons en Algérie où les arrestations et les condamnations se sont poursuivies en 2020 alors que l’année 2021 démarre avec de nouveaux procès.
La même source a précisé que 87 détenus politiques et d’opinion purgent des peines de prison à travers le pays ou sont incarcérés dans l’attente de leur jugement.
Dernièrement, la Ligue Algérienne de Défense des Droits de l’Homme (LADDH) a dénoncé une régression des droits de l’Homme dans le pays en évoquant une « violation continue » des droits des citoyens et un « recours abusif » à la détention préventive.
« Le pouvoir a profité de la crise, des mesures de confinement et des restrictions en raison de la pandémie de Covid-19 pour procéder à des arrestations ciblées des activistes pensant ainsi briser le Hirak », dénonce la LADDH dans son rapport annuel.
« Si le régime continue de ne pas respecter les droits de l’Homme, il aura ainsi fait le choix du chaos qu’il assumera devant l’histoire », met-elle en garde, relevant que le pouvoir algérien « est entre deux choix : sauver le système ou sauver le pays ».
Elle fait remarquer qu’après un « Hirak pacifique et exemplaire de plus de 20 mois, qui a mis les droits humains au centre du combat pour la dignité et la liberté, la situation a régressé ».
Cette montée de la vague de la répression en Algérie a aussi provoqué l’ire du Parlement européen qui a « condamné fermement l’escalade des arrestations et détentions illégales et arbitraires et du harcèlement judiciaire dont sont victimes les journalistes, les défenseurs des droits de l’Homme, les syndicalistes, les avocats, les membres de la société civile et les militants pacifiques en Algérie ».
Dans ce même élan de dénonciation, des dizaines de journalistes algériens, issus de divers horizons, ont fustigé un « climat de peur » dans le pays et exprimé leurs « inquiétudes » face à la multiplication des dangers qui menacent les professionnels des médias.
« L’exercice du journalisme relève de la mission impossible face à l’oppression et à la peur », dénoncent ces journalistes dans une récente pétition rendue publique à Alger, tout en appelant les autorités algériennes à « honorer leurs engagements, itératifs dans les discours officiels » et à « respecter la liberté de la presse ».
Les signataires de la pétition ont dressé un constat accablant de la situation de la presse dans le pays, marquée notamment par « les incarcérations, le harcèlement moral, les menaces, les poursuites judiciaires, les convocations par la Police judiciaire, le chantage par la publicité institutionnelle, les interférences visant à orienter les lignes éditoriales ».
Ces actes sont devenus des « risques majeurs, auxquels les journalistes sont confrontés comme une fatalité », déplorent-ils.