Au moment où l’agence de presse américaine Associated Press (AP) annonçait dimanche 23 août une visite « dans les prochains jours » du Conseiller principal du président Trump, Jared Kushner, au Maroc… Au moment où le Secrétaire d’État américain, Mike Pompeo, s’envolait vers le Proche Orient en vue d’un rapprochement entre Israël et « certains pays arabes », au lendemain de l’établissement controversé des relations diplomatiques entre Israël et les Émirats arabes unis… Au moment de ces tractations extrêmement délicates, où les intérêts stratégiques des pays sont en jeu…, la moindre précaution à prendre était évidemment de se garder de toute précipitation.
Or, ne voilà-t-il pas que, dans ce contexte hautement sensible, Saâd-Eddine El Othmani, est sorti du lot pour se fendre, le temps d’un meeting dominical de la jeunesse de son parti (Justice et développement), d’une envolée dont les conséquences sur la politique extérieure du pays étaient tout sauf calculées. Tenez, « nous refusons de normaliser nos relations avec l’entité sioniste »!!
Vous avez bien lu: « entité sioniste ». Un propos que même le Chef de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, s’abstiendrait de tenir, sous peine de se voir taxer d’ »antisémitisme »!
Le propos aurait pu passer inaperçu si son auteur était simplement un chef de parti. Or, il a été attribué au chef du gouvernement marocain et du coup, interprété comme la position officielle du Royaume, qui s’est vu ranger par quelques médias internationaux « du côté des perdants » du processus annoncé de réconciliation israélo-arabe!!
Face à l’ampleur qu’ont prise les remous suscités par sa déclaration, M. El Othmani a tenté de se rattraper en affirmant avoir tenu son propos en tant que chef de parti!
Seulement voilà, le « mal » était fait. Et ce n’est surtout pas le mouvement islamique radical de la résistance palestinienne, Hamas, qui dira le contraire. Ce mouvement a d’ailleurs été le premier à réagir en affirmant, le 24 août, accueillir « la position du chef du gouvernement du Maroc avec respect et gratitude ».
Lisez bien: « le chef du gouvernement du Maroc »!! Autant dire que l’Exécutif marocain traite avec le Hamas et non avec l’Autorité palestinienne, qui est toutefois l’interlocuteur d’Israël et de l’ONU dans le processus de règlement de la question palestinienne.
Il est vrai que le propos d’El Othmani a été tenu à l’occasion d’un meeting partisan. Il n’en demeure pas moins que le chef de ce parti est aussi et surtout le chef du gouvernement.
Il est vrai aussi que nos législateurs n’ont pas fait le nécessaire pour légiférer contre le cumul du statut de chef de parti et la fonction de chef du gouvernement, la position d’un parti ayant souvent été confondue avec celle de l’État marocain… Il n’en reste pas moins que la responsabilité en incombe en premier lieu à M. El Othmani.
Il est vrai aussi que l’État marocain, à sa tête la plus haute autorité du pays, le Roi Mohammed VI, président du Comité Al-Qods, se range aux côtés du peuple palestinien frère pour fonder son État avec pour capitale Al Qods Acharif. Mais cette position historique, juste et noble, ne saurait être instrumentalisée à des fins partisanes, encore moins électoralistes.
Les relations stratégiques du Royaume avec le monde sont assez complexes pour les soumettre aux calculs partisans étriqués et conjoncturels.