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Huit clés pour bâtir une défense arabe commune contre Israël et l’Iran

Par: Lahcen Haddad

 

 

Par: Lahcen Haddad 

La sécurité arabe est confrontée à des défis croissants, alors qu’Israël viole la souveraineté de pays allant du Liban à la Syrie, en passant par le Yémen, la Tunisie et le Qatar, et que la pénétration iranienne continue au Liban, en Syrie, en Irak, au Yémen et en Palestine. Les guerres civiles en Libye, au Soudan, en Syrie et au Yémen ont aggravé la faiblesse des États et transformé ces pays en arènes de compétition entre puissances régionales et internationales, tandis que les conflits artificiels entre États arabes – comme le Maroc et l’Algérie – alimentent les divisions et offrent à des adversaires comme Israël des occasions de perpétuer les conflits.

 

 

Dans ce contexte, la voix d’une action arabe commune s’est estompée, et les alliances tactiques ont pris le pas sur toute réflexion stratégique. L’intégration économique et sécuritaire n’a pas été réalisée, ni les progrès en matière de sécurité alimentaire ou commerciale, et le projet de défense arabe commune n’a pas pris racine.

Le résultat est que l’écart avec les puissances régionales et internationales s’élargit, car elles ont adopté la science et la technologie comme outils de pouvoir, tandis que les Arabes continuent de consommer ce qui est produit sans participer à sa fabrication.

La technologie et l’invention sont le fondement de la supériorité d’Israël en matière de défense et de pénétration, et ont été à la base de son influence extérieure en Syrie, en Irak et au Yémen. Les Arabes n’ont d’autre choix que d’adopter une stratégie unifiée, menée par ceux qui possèdent les capacités et l’expertise, rejoints par d’autres pays, pour bâtir un système arabe de progrès scientifique, technologique et militaire.

 

 

Premièrement: les pays arabes doivent fixer des objectifs clairs en matière de localisation de la fabrication, de la maintenance, des logiciels et des droits sur les données des équipements militaires qu’ils achètent. L’Égypte dispose d’une industrie militaire pleinement intégrée, regroupant ses agences et usines militaires, tandis que l’Arabie saoudite s’est fixé comme objectif de localiser 50 % de ses dépenses de défense d’ici 2030. Le Maroc s’apprête à créer deux zones industrielles de défense grâce à des partenariats avec la MEDZ et des entreprises étrangères. Ces efforts nécessitent une coordination arabe pour favoriser l’intégration et créer une industrie de défense régionale.

 

 

Deuxièmement: nous devons former des champions nationaux et régionaux en matière de technologies de défense. Le modèle EDGE des Émirats arabes unis illustre comment un pays arabe peut se positionner parmi les plus grands fournisseurs d’armes mondiaux en se concentrant sur les systèmes autonomes et la guerre électronique. En Arabie saoudite, le Fonds d’investissement public investit massivement dans l’aviation et la défense. L’Égypte dispose d’un vaste réseau d’usines d’armes, de munitions et de véhicules. Cependant, le défi réside dans le manque de coordination, qui nécessite le développement de réseaux intégrés incluant les PME, les laboratoires et les secteurs public et privé.

 

 

Troisièmement: la recherche et le développement doivent se concentrer sur les domaines à double usage, tels que les drones, la robotique, le spectre électromagnétique pour la guerre électronique et les communications résilientes. La cybersécurité est également devenue essentielle, car aucun système de défense ne peut fonctionner efficacement sans protection numérique. Les investissements arabes dans les satellites et les programmes spatiaux fournissent également une base qui peut être rapidement convertie à des fins militaires si des cartes des risques et des mécanismes de réponse conjoints sont élaborés.

 

 

Quatrièmement : Il est essentiel de créer des centres d’essai et d’évaluation pour les aéronefs, les logiciels et la cybersécurité, qui délivrent rapidement des certifications reconnues internationalement. Cette étape facilite les exportations et garantit la conformité des produits aux normes mondiales.

Cinquièmement : les pays arabes doivent protéger leurs données sensibles grâce à des centres de données locaux, dotés de systèmes ouverts empêchant les monopoles et permettant le changement de fournisseurs. Les Émirats arabes unis mettent en œuvre cette approche en liant souveraineté et contrôle des données, et cette expérience peut être étendue aux canaux d’échange de données entre pays partageant des visions communes.

 

 

Sixièmement : Les liens entre les universités, les laboratoires et l’industrie de la défense devraient être renforcés par le financement de projets visant à résoudre des problèmes de terrain tels que la lutte anti-drone ou le déminage. La collaboration entre officiers et ingénieurs et étudiants et chercheurs crée une nouvelle dynamique, tandis que les programmes spatiaux comme la sonde Hope fournissent une expertise transférable à l’industrie de la défense.

Septièmement : Les pays arabes pourraient choisir un projet technologique commun dans chaque domaine et le financer conjointement, en partageant dès le départ la propriété intellectuelle. Cela garantit une usine principale unique, mais répartit les capacités entre les partenaires. Les expériences du Qatar (Barzan), des Émirats arabes unis (EDGE) et de l’Arabie saoudite (SAMI) démontrent la faisabilité de ce modèle et sa valeur ajoutée.

Huitièmement : Les politiques d’approvisionnement et d’exportation doivent être actualisées. Au lieu de privilégier les plateformes standard, les contrats devraient être axés sur les résultats et les logiciels, avec des systèmes accélérés, de l’étude au prototype, puis opérationnels en 18 mois. Une fois les systèmes approuvés, leur exportation devrait être soutenue, comme c’est le cas avec l’Organisation arabe pour l’industrialisation en Égypte, qui combine technologies militaires et civiles.

L’objectif à court terme est de créer un portefeuille de défense équilibré et à faible risque : systèmes anti-drones, avions de reconnaissance autonomes, radars à courte portée pour protéger les aéroports et les bases, équipements de guerre électronique, un cyberdomaine pour les infrastructures et une meilleure connaissance maritime grâce à de petits satellites.

En conclusion, le succès de cette stratégie nécessite une coopération régionale pour partager les coûts et l’expertise, et une production locale pour renforcer les capacités. Les systèmes ouverts offrent une plus grande flexibilité et préviennent les situations de monopole. L’expérience des pays arabes confirme que la localisation et le développement conjoint améliorent l’efficacité et les opportunités d’exportation. Si des investissements intelligents sont réalisés dans la cybersécurité et l’espace, les Arabes pourront formuler un système de défense plus intégré et plus durable qui restaurera le concept de sécurité nationale arabe commune.

 

 

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