Depuis l’entrée en vigueur, jeudi dernier, de l’obligation de la présentation du pass vaccinal dans les lieux publics la pratique sur le terrain s’avère de plus en plus aléatoire. Il est vrai que beaucoup de Marocains se sont rués vers les vaccinodromes pour se faire injecter la première ou la deuxième dose, voire la troisième.
Mais en attendant que tout le monde dispose d’un pass vaccinal il est clair que les cafés, les hammams, les transports en commun, les supérettes et autres n’ont ni les moyens, ni la «légitimité » de contrôler les clients. D’ailleurs à Casablanca on dirait que les propriétaires de plusieurs lieux fermés ne sont pas au courant de l’instauration du pass vaccinal puisqu’ils ne vous demandent rien si ce n’est ce que vous voulez consommer ou acheter.
Autant dire que le plus grand problème qui se pose pour des pouvoirs publics demeure de contrôler les « contrôleurs » dans les administrations, les sociétés privées, les cafés, les restaurants et les bars… Même si les pouvoirs publics arrivent à mobiliser tous les caïds, les Mokkadems, les Chioukhs et autres employés, voire les services de police cela demeure une mission impossible.
Et pour cause les agents d’autorité ne peuvent pas faire le tour des cafés de leurs circonscription pour vérifier que chaque client dispose d’un pass vaccinal. Il serait ridicule, aussi, de demander à un, ou une, préposé du hammam ( en majorité des illettrés) de télécharger une application sur le site du ministère de la Santé, voire de consulter et lire un document pour contrôler leurs clients.
Sans oublier que cette exigence va demander un temps fou pour contrôler les usagers car elle risque de provoquer des retards notamment dans les transports en commun. Et puis il faut se rendre à l’évidence les propriétaires de ces commerces ouvrent pour gagner de l’argent et non pas pour refouler leurs clients qui n’ont pas de pass vaccinal.
D’autant plus et, c’est là le hic, l’obligation du pass sanitaire ne prévoit pas de sanctions pour les contrevenants sauf dans un cas précis. Le ministre la Santé Khalid Ait Taleb a, en effet, indiqué que tout propriétaire d’un lieu fermé qui accepte un client ne possédant pas de passeport vaccinal sera exposé à la fermeture de son commerce en cas d’apparition d’un foyer de contamination.
Encore faut-il que le ministre ou les autorités publiques puissent détecter l’origine d’un cluster quand on connait l’extrême mobilité des habitants dans une grande ville comme Casablanca, Tanger, Marrkceh, etc. C’est certainement en voulant anticiper ces difficultés que le ministre Ait Taleb avait affirmé que la mise en place du passeport vaccinal serait progressive.
Sauf qu’en l’annonçant d’une facon aussi brusque et sans fixer des délais raisonnables les pouvoirs publics ont provoqué la colère de la population. Des députés, des politiques et des acteurs de la société civile ont dénoncé cette attitude et ont même signé une pétition contre l’obligation de la présentation du pass vaccinal.
D’ailleurs les parlementaires vont évoquer cette question, demain lundi, lors d’une séance plénière à la chambre des représentants. L’inénarrable députée Nabila Mounib a même décidé de saisir la cour constitutionnelle sur ce sujet même si elle sait pertinemment que cette juridiction validera la décision du gouvernement.
En France les citoyens ont fini par s’y résigner et les sages de la cour constitutionnelle ont jugé conforme à la constitution la proposition du gouvernement d’imposer le contrôle d’accès via un pass sanitaire. Autant dire que sur le plan des libertés individuelles ou collectives cette question est tranchée Maroc.
Ce qui ne le saura, peut-être, pas c’est sa stricte application sur le terrain car beaucoup d’anti-vaccins continuent à s’y opposer farouchement. Ce qui risque de provoquer des rixes dans les lieux fermés comme cela a été le cas à Rabat quand un client a agressé un serveur qui lui demandait de présenter son pass vaccinal.