Quatre ans de prison ferme ont été requis, mardi, par le représentant du parquet contre le journaliste Khaled Drareni, jugé en appel mercredi devant la Cour d’Alger.
Drareni, qui est directeur du site d’information en ligne « Casbah Tribune » et aussi correspondant en Algérie pour la chaîne de télévision française TV5 Monde et pour l’ONG Reporters sans frontières (RSF), est accusé de « porter atteinte à l’unité nationale » et « d’incitation à un attroupement non armé ».
En première instance, devant le tribunal de Sidi M’hamed, Drareni, qui est en détention depuis plus de cinq mois, avait écopé d’une peine de trois ans de prison ferme.
Khaled Drareni avait été arrêté le 7 mars dernier alors qu’il couvrait une marche populaire à Alger avant d’être placé dans un premier temps sous contrôle judiciaire puis incarcéré fin mars.
Le 10 août, le tribunal de Sidi Mhamed a condamné Khaled Drareni à trois ans de prison ferme, une condamnation qui a déclenché un élan de solidarité en Algérie et à l’étranger.
Lundi, trois rassemblements de soutien ont eu lieu à Alger, Paris et Tunis pour exiger sa libération.
Plusieurs organisations de défense des droits humains et des partis avaient dressé un bilan sombre de la situation de la liberté de la presse en Algérie en évoquant un « sale temps pour les médias » dans ce pays maghrébin.
Dans ce sens, ils ont exhorté les autorités algériennes à mettre fin aux poursuites judiciaires et à libérer les journalistes emprisonnés, dont Khaled Drareni.
Selon ces défenseurs des droits de l’Homme, la liberté de la presse et d’expression se dégrade en Algérie, sur fond de la suspension du mouvement populaire anti-régime « Hirak » et de la crise sanitaire, avec des journalistes en détention et la censure de médias en ligne.
« Il n’est pas normal que des journalistes soient en prison. Il y a eu une Révolution pour un Etat de droit et des libertés, dont la liberté d’expression, mais le système politique poursuit des journalistes qui ont une ligne éditoriale qui déplaît », déplore l’avocat Mustapha Bouchachi, cité par les médias algériens.
Dans un communiqué, le Front des Forces socialistes (FFS), le plus ancien parti d’opposition algérien, a accusé pour sa part le gouvernement de se positionner « à contre-courant de la promotion des libertés en général et de la liberté de la presse en particulier » alors que la pandémie de Covid-19 « nous fait basculer dans l’inquiétude et l’incertitude ».
Ces organisations non gouvernementales et organisations de défense des droits de l’Homme ont aussi appelé à la fin des poursuites judiciaires et arbitraires à l’encontre des journalistes, relevant que des dizaines de personnes sont toujours arrêtées dans le cadre du mouvement de protestation.
De son côté, la « Coalition des Amis du Manifeste pour l’Algérie » a condamné la répression et l’exploitation du pouvoir judiciaire contre les militants du mouvement populaire de contestation « Hirak ».
La coalition a exigé, dans un communiqué, l’arrêt de toutes les poursuites engagées contre les militants et la libération immédiate de tous les détenus politiques, ainsi que le rétablissement de leur considération juridique, sociale, matérielle et morale.
L’Algérie figure à la 146e place (sur 180) du classement mondial de la liberté de la presse 2020 établi par RSF. Elle a dégringolé de 27 places par rapport à 2015 (119e).