L’empereur Trump (Par: Aziz DAOUDA)

Par: Aziz DAOUDA

C’est fait, l’empereur a été intronisé et béni par toutes les religions présentes sur le territoire ou presque. Tel un empereur romain, il est intronisé au sénat. Le Capitole est choisi pour des raisons de météo… Dieu le Tout-Puissant en a décidé ainsi. Il fait froid et c’est à l’avantage du 47è président des USA.

Il dit même que s’il n’a pas succombé à la tentative de meurtre qu’il a subie, c’est que Dieu le Tout-Puissant avait décidé de le maintenir en vie pour la noble mission de rendre à l’Amérique sa grandeur.

Comme dans une certaine mythologie, c’est à un descendant divin, à un messager que l’on a eu à faire et, en bon prophète, il a nous a gratifié de ses dix commandements.

Quoi de plus normal que de commencer par dire aux Américains et au monde qu’«aujourd’hui nous ouvrons (c’est lui qui parle) un nouveau chapitre où l’Amérique reprend sa place de leader, non par arrogance, mais par son destin d’excellence et de résilience». C’est à se demander si un jour l’Amérique avait perdu le leadership du monde depuis qu’elle remporta ses premières batailles contre les Espagnols en 1898 voilà quasiment trois siècles. Cette guerre avait sonné le glas de la puissance hispanique, qualifiée alors de désastre par les ibériques.

Dans un flegme on ne peut plus impérial, le seigneur des lieux poursuivi en annonçant à tous que «l’âge d’or de l’Amérique commence maintenant, car nous croyons que rien n’est trop grand pour ceux qui ont foi en leur pays et en eux-mêmes». Quelle leçon à tous que de nous rappeler que la première richesse d’une nation est de croire en elle-même et en les siens.

Une fois ces termes de grandeur, d’ambition et de puissance prononcés, il fallait bien évidemment en venir à leurs déclinaisons, et, vlan !, «Nous déclarons une urgence nationale à la frontière sud, car protéger notre peuple est la première mission sacrée de ce gouvernement». Le pays, qui ne doit sa prospérité et sa puissance qu’à l’immigration, va se fermer à la première source des flux humains qu’il dit l’inonder, celle qui lui vient de son flanc sud. L’Amérique ne veut pas s’hispaniser… Et pourtant elle doit énormément à ces bras qui lui sauvent l’agriculture et débarrasse sa jeunesse de tous les métiers astreignants, et de toutes les besognes auxquelles le jeune américain ne veut plus toucher. Il en fait une mission teintée de sacralité.

Les familles américaines seraient inquiètes et doivent donc être rassurées et voilà qu’il leur sert un gage on ne peut plus clair et plus ambigu à la fois: «Nous combattrons les cartels qui détruisent des vies et divisent des familles. A partir d’aujourd’hui ils seront reconnus comme ce qu’ils sont : des ennemis de la paix». De quels cartels il s’agit et de quel ennemi ? Le doute est ainsi semé et le spectre d’une chasse aux sorcières traversent les esprits. On aurait dit le président Truman ressuscité… Mais là la manœuvre n’est pas contre l’ennemi que constituait alors le communisme mais plutôt à l’encontre de cartels encore non identifiés. Les familles américaines sont-elles vraiment ainsi mises à l’abri des ennemis visés?

Seul le temps va le démontrer.

Changement climatique ou pas, les USA ne sont pas responsables, ce sont les autres qui le sont, la Chine en premier. La pollution que son économie génère est le responsable de ce qui se passe sur terre et, du coup, l’Amérique se dédouane et peut gaiement se retirer des accords de Paris. «Nous choisissons de nous retirer des accords qui brident notre liberté économique, car nous croyons en l’innovation américaine, une innovation qui éclaire le monde» et il poursuit dans sa lancée: « Il n’y a pas de place pour l’ambiguïté : nous reconnaissons que la nature et le bon sens nous dictent – la beauté de nos différences, tout en célébrant notre humanité commune. »

Alors la salle se lève et applaudit. Elle est acquise et c’est normal. Les invités sont choisis et bien choisis. Ceux-là uniquement par obligation restent assis à vivre leur défaite; Biden and co, les anciens présidents de l’autre bord et le peu de démocrates présents sont stoïques. Inertes, ils encaissent tels des boxeurs battus au coin d’un ring et d’un public hostile.

«Ce jour marque notre volonté de rétablir notre souveraineté dans toutes les pièces du globe, et nous affirmons que les ressources qui enrichissent cette nation doivent d’abord servir son peuple». Des termes on ne peut plus clairs dans la voix du souverainisme affichée, empreinte d’un égocentrisme on ne peut plus puissant. Mais n’est-ce pas là l’expression d’une quelconque menace?

La liberté passe par un libéralisme outrancier ; tous les verrous vont sauter désormais. «Nous mettons fin à tout programme qui compromet nos libertés fondamentales ou sacrifie nos valeurs sur l’autel des dogmes ». Il parle de valeurs mais ne les définit pas. Lesquelles va-t-il mettre à l’avant ? Sûrement pas celles défendues par ses ennemis politiques. Ceux à qui ils ne veut rien pardonner ; tout au long de la soirée, il n’arrêtera pas de leur envoyer des messages sournois et des piques sans rougir un instant. Et comme pour les rapetisser davantage, il leur sert le coup fatal : «l’Amérique n’est jamais aussi grande que lorsqu’elle rêve audacieusement, travaille avec acharnement et fait de l’impossible ce qu’elle fait de mieux». Il leur dit clairement : vous manquez d’audace et de courage pour bien servir le peuple américain.

Pour conclure ce premier moment de gloire, avant la série de signature des « President Orders », moment qu’il choisit en premier devant ses troupes les plus populaires. Que c’est étonnant que de signer de tels actes dans une salle de sport, au milieu d’une foule au moteur surchauffé.

Enfin, il ramène à la surface tous ses griefs contre une certaine presse et dit à tous: «Nous restaurons un espace public où chaque voix peut s’élever librement, sans crainte de censure car notre liberté d’expression est le cœur battant de notre démocratie». Chaque voix… entendons par là, chaque citoyen sur n’importe quel support et sans régulation aucune. Un véritable cadeau pour Marc Zuckerberg et indirectement pour Sundar Pichar. Jeff Bezos et Elon Musk en reçoive un de plus, le patron les encourage à aller sur Mars. Comme pour le réconforter de sa déconvenue avec l’un de ses enfants, le patron de Space X et de Tesla est heureux quand il l’entend dire que désormais aux USA, il n’y a plus que des hommes et des femmes. Le glas est sonné pour le wokisme. Tous ces Giga milliardaires étaient heureux d’être assis aux premières loges. Bien derrière, on pouvait à peine apercevoir la tignasse du président de la FIFA.

Voilà donc l’empereur des Amériques finalement intronisé, du coup le golfe du Mexique change de nom. Il est désormais appelé Golf de l’Amérique. Le canal de Panama redevient américain et le monde parfaitement averti: Trump est bien là pour driver le monde vers d’autres horizons.