Médias. « Nombre de vues »: la séduction dangereuse de l’audience fictive

Le nombre de vues d’une annonce indique l’ensemble des internautes qui ont regardé la vidéo ou ont cliqué sur le lien de la publication, mais pas forcément une lecture du contenu ou un visionnage d’une vidéo.

Dans les détails, la technique permet de mesurer le nombre de visionnages et le temps de connexion à l’article, estimé temps de lecture. Mais, dans tous les cas, ce nombre de « vues » ne donne aucune idée sur le nombre réel des internautes satisfaits de l’annonce, sur la part de ceux qui l’ont dénoncée, le nombre de ceux restés neutres vis-à-vis du contenu et tous les autres qui l’ont partagée au maximum pour manifester leur colère en avisant les leurs. 

Dans certains cas, plusieurs vidéos ne « cartonnent » sur la Toile qu’en raison de leur mascarade. Ainsi, ce nombre, qui renseigne sur le degré de colère des internautes, est vendu comme un succès du site. Ou du personnage mis en exergue.

« Il est suivi par X millions d’internautes », dit-on dans l’entourage médiatique pour persuader d’autres à rejoindre cette « station spatiale » dont on parle. La manœuvre est ainsi vendue au pouvoir sur le segment de l’influence et aux annonceurs sur l’axe de la consommation.

Dans le premier cas, le site en question tire profit des « affinités » avec le pouvoir et dans le deuxième cas, il cartonne en termes d’annonces commerciales. Comme une scie : en montant, il mange et en descendant il mange, dit un vieil adage.

Mais lorsque les uns et les autres cherchent à obtenir un meilleur retour sur l’investissement, ils ne récolteraient que la tempête. Sur l’axe de l’influence, c’est la colère qui est provoquée et non pas une persuasion ou manipulation de l’opinion publique.

Sur l’axe de la consommation, la publicité accompagnant les vidéos en question inciterait les consommateurs à déprécier le produit ou l’article et non pas à provoquer le désir de le désirer davantage.

Résultat des courses: la méfiance de la population s’amplifie à l’égard du pouvoir et des dégâts sont occasionnés pour des annonceurs dont certains investissent aussi sur le premier segment. Pour ces derniers, les dégâts seraient innombrables sur toute la ligne.

Quant aux fondateurs de ces sites, après la manœuvre, ils investissent dans l’immobilier et le foncier. Dans le temps, le journal était vendu à des lecteurs et le nombre de lecteurs influençait le contexte et séduisait les annonceurs. Aujourd’hui, le média fabrique une audience fictive qu’il vend au pouvoir et aux annonceurs.