Le dernier voyage de Mohamed SEKTAOUI… un militant en or, un homme d’exception…

Par: M’Hamed Hamrouch

Je suis dévasté par le décès du militant et poète Mohamed Sektaoui, ce matin. Il avait 74 ans. Je l’ai connu il y a 30 ans, alors que je faisais mes premières armes de journaliste au quotidien «Libé». D’abord comme adjoint au président d’Amnesty International -Maroc, docteur feu Omar JBIHA, dont le Cabinet, alors sis boulevard 2 mars, à Casablanca, tenait lieu de quartier général aux membres d’Amnesty International – Maroc, dont votre modeste serviteur.

J’ai alors ressenti une réelle empathie de sa part et un appui sincère que je n’oublierai jamais, notamment quand j’ai été proposé, à la faveur d’une réunion avec l’ancien directeur général d’Amnesty International pour l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient, Mohamed Guerchab, pour un stage de formation à Bingerville, une commune du sud de la Côte d’Ivoire située au bord de la lagune Ebrié.

Je n’oublierai jamais sa joie quand, de retour de mon stage à Bingerville, il avait applaudi, avec feu Driss Benzekri, ancien président de l’Instance Equité et Réconciliation (IER) et du Conseil consultatif des droits de l’Homme (CCDH), le premier numéro du bulletin interne d’Amnesty Maroc, que j’ai co-réalisé avec feu Abdelaziz Elouadie, avec qui j’ai partagé aussi un long compagnonnage.  

Aussi loin que remontent mes souvenirs, ce fut lors de l’avènement du gouvernement Youssoufi I (14 mars 1998 – 2000), dit «gouvernement d’alternance» qui allait inaugurer une rupture avec un passé qui était tout sauf un long fleuve tranquille.

J’ai connu Mohamed Sektaoui aussi comme militant de gauche, avec qui j’ai partagé les valeurs de justice sociale, d’égalité des chances, de progrès, de fraternité, de tolérance, de travail, de liberté réelle… Natif de Ksar El Kébir, son engagement politique et syndical a commencé au sein de l’UNFP, ancêtre de l’USFP, et au PPS, sans oublier sa militance au sein du Syndicat national de l’enseignement…

Feu Sektaoui avait donc plusieurs cordes à son arc mais son combat, le nôtre aussi, était pour ce Maroc que nous appelions de tous nos vœux et luttes: un Maroc émancipé, décomplexé, épanoui, libre, égalitaire…

Derrière le brillant parcours de notre cher défunt, une vocation que j’ai découverte tard, un peu très tard, et que le défunt cachait avec un soin quasi-religieux. Cette vocation de poète qui m’a impressionnée. Je vous laisse admirer ce poème annonciateur de son départ: « Les Oiseaux blancs », extrait de son premier recueil de poésie «Les 40 Balcons».

« Tôt j’ai ouvert mon balcon

Et j’ai attrapé la lumière du soleil

Brillant dans le lac immobile.

En chemin j’ai trouvé le cygne blanc

Celui qui m’aimait

Seul à m’attendre

Je n’ai jamais su

Je ne suis pas Tchaïkovsky

Je ne joue pas de musique de ballet

Ou casser les noix pour les filles

Je ne suis pas un prince amoureux de la Belle au bois dormant ».

Avec le départ de Mohamed Sektaoui, le Maroc perd un militant authentique qui a apporté sa contribution précieuse à l’édifice de la Nation. Humblement, généreusement. Dignement.

Repose en paix, mon frère Mohamed.