Désaccord sur le genre du mot Covid… 

 
A l’instar du Québec, l’académie française vient de décider le féminin pour le mot Covid en suivant l’exemple de l’Office Québécois de la Langue Française… décision qui est loin d’être suivie par la presse outre-Manche ni francophone en général, à l’exception des francisants canadiens.
 
Donc la Covid serait l’orthographe appropriée pour cette dénomination nouvelle, qui selon les immortels devrait être au féminin puisque le noyau serait équivalent au nom français féminin maladie selon la norme qui stipule que les sigles et acronymes ont le genre du nom qui constitue le noyau du syntagme dont ils sont une abréviation.
 
Soit, en tant que francophone et en l’espèce la curiosité étant loin d’être mauvaise mais plutôt vertu, je m’intéressai à l’académie française et j’appris avec étonnement plusieurs éléments quant à cette institution, que de prime abord nous pensons garante de la langue française.
 
L’académie a plus un pouvoir lobbyiste qu’institutionnel, puisque les prérogatives juridiques qu’elle tend à s’approprier sont l’apanage de la Délégation Générale à la Langue Française et au Langues de France (DGLLFLF).
 
Concrètement, l’académie lors de sa création avait pour mission la normalisation de la langue de Molière, notamment et surtout l’édition d’un dictionnaire de référence ; et pour info, depuis quatre siècles, il n’y eut que huit éditions du fameux dictionnaire, la première en 1694 et la huitième et dernière en 1935.
 
Un dictionnaire est toutefois en préparation depuis 1986 et qui en serait aux dernières nouvelles à la 19ème lettre de l’Alphabet en 2017 ; ce qui fit dire à Furtière, académicien au 17ème siècle qui sera exclu de la coupole par la suite,  que le dictionnaire de l’académie risque dès sa parution d’être inutile puisqu’il ne prend pas en compte les termes techniques et scientifiques (il éditera son propre dico par la suite).
Il faut dire que la libéralisation de l’imprimerie surtout au dix-neuvième et début du vingtième siècles a vu l’apparition de dictionnaires connus et reconnus, fruits de l’investissement privé, à l’instar du Larousse et du Robert ; qui in fine conditionnent nos rapports à l’orthographe.
De plus, et depuis sa création en 1634 par le célèbre Cardinal de Richelieu, l’académie revendique une histoire que d’aucuns estimeraient tronquée ; et sans entrer dans une polémique de revendication(s) historique(s) sur lesquelles les historiens eux-mêmes peinent à se mettre d’accord, nous pouvons citer l’exemple emblématique du serment de Strasbourg de 842, que l’académie estime à tort comme étant le premier texte écrit en Français.
La dogmatisation d’un passé glorieux ou d’une langue idéale et idéalisée ne peut que limiter une vision du présent et de l’avenir, d’autant plus qu’une langue est toujours enrichie des usages et des échanges avec d’autres langues.
L’exemple typique des soi-disant ancêtres gaulois est révélateur, surtout que la langue française d’origine latine ne comporte qu’une centaine de mots gaulois d’origine celte, beaucoup moins que les mots arabes qui y sont présents.
Pour rappel, l’académie française dépend dans les faits directement du président de la république française et fonctionne sur un modèle de cooptation pour la nomination de nouveaux membres dont le nombre est fixé à 40 ; depuis l’ère Richelieu, il y a plus de trois cent cycles solaires.
 
Mise à part un passé (sinon un passif) pour le moins polémique, la majorité des immortels sont loin d’être linguistes voire pas du tout, mais sont plutôt des personnalités du monde littéraire, académique et surtout politique, ce qui peut nous pousser à un questionnement sur les positions souvent tranchées de ladite institution.
 
Rappelons que les soft-power usent et abusent de la langue en tant que pouvoir d’attraction culturelle, et à plus forte dose la tradition d’union linguistique française qui vient y rajouter une couche, que l’on soit ou pas de souche.
 
Oui, nous ne sommes ni français ni en France, mais nous sommes concernés du fait de notre appartenance à la francophonie, ce qui devrait nous pousser à se poser légitimement la question de l’instrumentalisation de ladite langue au service de visées politiques.