Le 18 décembre coïncide avec la Journée internationale des migrants. L’occasion de revenir sur ce phénomène qui divise profondément la planète: un boulet ou une opportunité à saisir. Radouan Bachiri, journaliste marocain basé à Bruxelles, apporte chiffres à l’appui un éclairage édifiant sur ce phénomène.
Par Radouan Bachiri
Depuis toujours, l’humanité a été en mouvement. Certaines personnes se déplacent pour trouver un travail ou d’autres perspectives économiques, pour rejoindre leurs familles ou pour étudier. D’autres se déplacent pour fuir un conflit, des persécutions, le terrorisme ou des violations des droits humains. D’autres encore n’ont d’autre choix que de se déplacer face aux conséquences des changements climatiques, aux catastrophes naturelles ou à d’autres facteurs environnementaux.
Malgré ces causes auxquelles la migration est liée, elle a évolué dans ses modalités et a toujours été considérée comme un acte et un comportement social inépuisable qui contribue à la construction des sociétés et des nations en développement, et si ce comportement ne se limite pas uniquement à l’humain, ce dernier lui a donné d’autres dimensions qui ne se limitent non plus au social, mais s’élargit au culturel, l’économique, le politique et l’environnemental.
Aujourd’hui, il n’y a jamais eu autant de personnes vivant dans un autre pays que celui dans lequel elles sont nées. En 2019, le nombre de migrants dans le monde était d’environ 272 millions de personnes, soit 51 millions de plus qu’en 2010. Toutefois, la proportion de migrants au sein de la population mondiale n’est que légèrement plus grande, passant de 2,3 % en 1980 à 2,8 % en 2000. Ce chiffre est passé à 280 millions de personnes en 2020 selon le Centre d’analyse des données migratoires mondiales de l’OIM, les femmes représentent 48 % du total des migrants. Ce qui a fait de la migration une question prioritaire au niveau mondial, incitant ainsi les chefs d’Etat et de gouvernement à se réunir pour la première fois dans le cadre de l’Assemblée générale des Nations Unies en adoptant la Déclaration de New York pour les réfugiés et les migrants le 19 septembre 2016.
Le Maroc, un exemple à suivre
C’est à Marrakech, qu’un processus de consultations et de négociations intergouvernementales a été lancé en vue de l’élaboration d’un Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières. Un processus conclu le 10 décembre 2018 par la majorité des Etats membres des Nations Unies et officiellement adopté le 19 décembre 2018.
Certains pays sont considérés comme exportateurs d’immigration ou un point de départ, et d’autres pays un point d’accueil, le Maroc par sa localisation stratégique, a toujours été un point de départ et de transit, devenu aujourd’hui un pays d’accueil également, car il a fait l’objet d’une attention particulière au vu des évolutions qu’il a enregistrées en termes de sécurité, de stabilité et de développement économique, ainsi que la diplomatie politique qu’il a menée en faveur des immigrés depuis 2014.
Les initiatives et mesures prises à cet égard, ont fait que l’Union africaine a choisi le Roi du Maroc comme leader sur la question de la migration de l’UA lors du 28ème Sommet, et l’initiative présentée par le Maroc au 30ème Sommet de l’Union africaine en janvier 2018, qui concerne l’agenda africain pour la migration. Il a constitué une base essentielle pour guider le processus du Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières.
D’autre part, la migration intra-africaine se présente au milieu du mouvement migratoire mondial. Sur les 24,7 millions de migrants au niveau africain, 19,4 millions migrent à l’intérieur du continent, soit 80 % du total. Le phénomène ne s’est pas imposé fortement dans le passé comme c’est le cas aujourd’hui. Ce qui est une des raisons qui ont fait du Maroc un pays d’asile et de stabilité pour certains immigrés.
Selon des données officielles fournies par le département des affaires économiques et sociales des Nations Unies, la proportion de migrants représente environ 0,3 % de la population marocaine, leur nombre a dépassé le cap de 100.000 en 2017, les femmes représentent 49,8 % du nombre total de migrants, et la plupart sont originaires de pays d’Afrique subsaharienne et d’autres qui ont été contraints de quitter leurs pays et se trouver sur le sol marocain, sont des Syriens, des Libyens, des Irakiens entre autres, la majorité (84,9%) ont quitté leur pays d’origine depuis 2010, y compris ceux qui ont résidé au Maroc par le passé plus d’une fois et aussi 94,2% qui sont venus au Maroc pour la première fois.
La stratégie migratoire menée par le Maroc a permis à de nombreux immigrés d’installer leur statut juridique, en particulier les immigrés qui ont une activité professionnelle, même si aujourd’hui la question leur pose problème à cause des effets de la pandémie, qui a conduit nombre d ‘entre eux à perdre leurs contrats de travail, surtout que leur majorité travaille dans le secteur informel, ceci bien évidemment affecte la mise en œuvre effective de la loi sur l’asile et l’immigration au Maroc et la stratégie nationale qui a servi de base pour traiter la question de l’immigration et de l’asile sous toutes ses formes, qu’il s’agisse de l’immigration clandestine forcée ou de l’immigration qui inclut des ressortissants de pays exonérés de visa pour entrer au Maroc (pour la plupart en provenance de pays européens), ils représentent aujourd’hui un nombre important qu’il faut traiter et s’en occuper en raison de leur impact sur le marché du travail.
Malgré que le renouvellement de leur carte de séjour est basé essentiellement sur le contrat de travail, vu les circonstances mondiales actuelles, il est nécessaire d’établir une identification de tous les migrants sur le sol marocain pour diverses raisons entre autres médicale et sécuritaire (Vaccination pour tous et identification point de vue sécurité).
Un rapport publié par la commission européenne sur la politique migratoire de l’UE, explique qu’après avoir atteint un pic en 2018, l’Espagne a enregistré une baisse du nombre d’arrivées, pour toute une série de raisons, entre autres le partenariat étroit avec le Maroc, en vue de contribuer au renforcement du contrôle des frontières et à la lutte contre la traite des migrants.
La baisse du nombre d’arrivées irrégulières observé également à la frontière Biélorussie-Pologne
A la suite des bouleversements politiques en Biélorussie et des mesures restrictives adoptées par l’UE, la Biélorussie a commencé, en juin 2021, à organiser des vols et des déplacements internes afin de faciliter le transit de migrants vers l’UE, d’abord vers la Lituanie, puis vers la Lettonie et la Pologne. La majorité des migrants étaient des ressortissants irakiens, afghans et syriens.
Lors du Conseil européen des 24 et 25 juin 2021, les dirigeants de l’UE ont condamné toute tentative de pays tiers d’instrumentaliser les migrants à des fins politiques. Le 22 octobre 2021, ils ont déclaré que l’UE continuera de lutter contre l’attaque hybride en cours lancée par la Biélorussie, y compris en adoptant de nouvelles mesures restrictives à l’encontre de personnes et d’entités juridiques.
Suite aux efforts concertés au niveau de l’UE, le nombre d’arrivées irrégulières quotidiennes a fortement chuté. Toutefois, la pression migratoire à la frontière reste élevée.
Selon une enquête de l’Union Européenne, sans migration, la population européenne aurait diminué d’un demi-million en 2019, étant donné que 4,2 millions d’enfants sont nés et que 4,7 millions de personnes sont décédées dans l’UE. En 2020, selon des données provisoires, la population de l’UE a diminué d’environ 300 000 personnes (passant de 447,3 millions le 1er janvier 2020 à 447,0 millions le 1er janvier 2021), en raison de la combinaison de trois facteurs: la diminution du nombre de naissances, l’augmentation du nombre de décès et la baisse du solde migratoire.
L’UE a adopté différents dispositifs et cadres réglementaires pour gérer les flux de migration légale concernant les travailleurs hautement qualifiés, les étudiants et les chercheurs, les travailleurs saisonniers et les personnes aspirant au regroupement familial.
Par leurs connaissances, leurs réseaux et leurs compétences, les migrants contribuent à des communautés plus solides et plus résilientes. Le paysage social et économique mondial peut être façonné par des décisions fortes visant à relever les défis que posent la mobilité mondiale et les migrants et à saisir les chances qu’ils offrent. Par les orientations qu’il renferme, le Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières offre l’occasion de faire de la mobilité humaine une réalité et d’en saisir les chances.