À peu d’exceptions près, ils dormaient le sommeil de prétendus justes. Cinq, voire dix bonnes années d’engourdissement. Le temps de régler leurs montres ou leurs comptes et, partant, de faire le ménage dans la maison. À renvoyer certains. A recruter d’autres. À faire dégoûter d’autres encore. L’essentiel semble être la devise suivante: « Avancer en rangs serrés sans grand bruit en interne, quitte à faire le lit de la fronde en externe ». De toutes les manières, on ne peine pas à évoquer la formule d’explication toute prête: « Le parti n’est pas une caserne. Et les divergences des points de vue sont autant un signe de bonne santé que l’expression de la dynamique intrinsèque de l’organisation ». C’est quasiment un exercice généralisé sur la scène politique marocaine.
Chemin faisant, on prend la parole, de temps à autre, devant micros et caméras, pour dire ce qu’on croit pouvoir convaincre le peuple qu’on est là pour faire entendre sa voix. La tribune des deux Chambres du Parlement sert aussi le même dessein qu’on dessine à plusieurs mains parfois.
Et souvent, l’argumentaire suivait une trame inamovible: l’Histoire. Celles de certaines figures historiques.
Certes, on n’ôtera à personne son histoire, mais la légitimité historique n’est plus un argument. Elle a fait son temps avec d’autres générations à qui certains événements « parlaient ». Il n’y a qu’à voir la pyramide démographique du pays pour se rendre à cette évidence.
Pourtant, il en est des sorties qui nous rappellent que ce n’est pas demain la veille qu’on décrétera la rupture avec de tels paradigmes. Pour emprunter au lexique du « matérialisme historique », on dira tout simplement que les conditions objectives ne sont pas les mêmes. Par voie de conséquence, la lecture du présent ne pourrait obéir à l’approche « ante » ainsi adoptée. Encore moins une projection dans l’avenir. Notamment, immédiat. Celui, pour faire bref, d’un mandat.
Toujours est-il qu’il y a, parfois, des confusions de genres. Notamment lorsqu’il s’agit de dresser les contours d’un positionnement sur l’échiquier politique.
Certes, les théories évoluent, suivant les évolutions sociales et/ou sociétales, mais la « clarification » des choix s’impose.
Ceci pour en arriver à cela.
Lors de sa sortie de présentation du programme du parti de la Rose, le premier secrétaire de la formation des héritiers de Abderrahim Bouabid a dit prôner une nouvelle politique à vocation sociale et démocratique. Celle-ci, a-t-il argué, qui serait de nature à permettre aux Marocaines et aux Marocains de jouir d’une vie digne. Et Driss Lachgar que le programme de l’USFP, qui ambitionne de figurer sur le podium des résultats des échéances du 8 septembre, constitue « la réponse social-démocrate marocaine » aux grands défis de l’heure, notamment ceux induits par la pandémie. Tout en ajoutant que ledit programme trace la voie à une approche rénovée et une alternative réaliste.
Or, comme le parti est conscient qu’il va falloir des alliances pour gouverner, il se presse de préciser qu’il ne pourrait y avoir d’alliances qu’avec les vrais partis libéraux. Étant entendu que les valeurs du libéralisme sont l’égalité, la liberté et la Justice. C’est pratiquement la même trame idéelle qu’il utilisera, lundi 16 août en soirée sur le plateau d’une émission de 2M.
Maintenant, partant du postulat que la charge sémantique des concepts est « déterminée » par leur toile de fond historique, quand bien même cela pourrait ne pas « intéresser » l’électorat -principal destinataire d’un discours de campagne électorale-, il n’en demeure pas moins important d’éclairer sur le référentiel revendiqué à la social-démocratie. D’autant plus que, depuis la XIXème siècle jusqu’à nos jours, le concept a traversé bien des mutations. Bien que, valeur aujourd’hui, le seul « référencement » renverrait à plusieurs écoles de la pensée politique moderne.
Sans trop entrer dans les détails, l’on peut résumer le propos à l’expérience allemande, scandinave, française (avec les différentes ailes du parti socialiste, de Jacques Delors à François Hollande, en passant par Pierre Mauroy, Ĺionel Jospin, Michel Rocard, pour ne citer que ceux-là), ou encore britannique avec la mue de la Troisième Voie, développée par Tony Blair, qui a « migré » vers la social-libérale.
Dans les différents cas de figure cités, il est question non seulement de théorisation, mais de « traductions » de la vision prônée en programmes d’action.
Bien entendu, le contexte n’est pas le même, les paramètres socio-économiques ne le sont pas non plus, de la même manière que les conditions politiquement objectives diffèrent.
Du coup, l’on déduit qu’il va falloir trouver le mix maroco-marocain pour que les Marocaines et les Marocains appréhendent mieux les visions des uns et des autres. Question d’y voir plus clair !