La 11ème édition de Ciné-université organisée par La Fédération Nationale des Ciné-clubs au Maroc, s’apprête à organiser une table ronde autour d’une figure emblématique du cinéma marocain, en l’occurrence, Noureddine Saïl. Ce dernier est un des rares intellectuels et penseurs d’aujourd’hui dont l’esprit encyclopédique joue un rôle primordial dans sa façon d’étudier les grandes questions du monde. Une icône du cinéma marocain qui a toujours impressionné avec délicatesse son audience.
Il est le père spirituel des cinéphiles marocains. Avec des émissions comme « Aflam », « Le cinéma de minuit » et « Le cinéma des réalisateurs », il a installé une deuxième vie dans les écrans de télé noir et blanc. En effet, il y avait la musique d’Éric Satie, sans oublier l’ombre d’Orson Welles qui nous invite à arpenter l’univers de son personnage chaotique « Othello » ou « Le procès » de Kafka où la bureaucratie est présentée sous un regard ténébreux.
Avant de nous amener aux steppes sibériennes guidé par le vieux « Dersou Ouzala » – l’un des œuvres majeures de Kurosawa – ce monsieur de cinéma, nous présente dans un discours simple et profond, la genèse d’une telle œuvre ainsi que le contexte général qui a fait qu’un moment, le réalisateur a entrepris le chemin afin de nous révéler la spécificité de son œuvre. La voix qui ne s’oublie jamais, qui retentit encore comme un mantra, celle de Noureddine Saïl.
Pour cette table ronde, les cinq intervenants, Hammadi Guerroum, Mohamed Bakrim, Hamid Tbatou, Khalil Damoun et Mokhtar Aït Omar n’ont pas la tâche facile pour cerner les contours d’une expérience en perpétuel éclatement. Noureddine Saïl, a été un fervent défenseur de la libre circulation des idées en proclamant le décloisonnement des genres. Son parcours atypique et ses multiples préoccupations ont fait de lui un penseur éclairé animé par l’esprit de la construction et la création des projets créatifs. Il faudrait plusieurs tables rondes pour poser les jalons d’une lecture digne de sa richesse intellectuelle. Sans oublier qu’il était un homme de terrain, en mettant ses idées sur les rails d’une réalité pas facile à convaincre de la pertinence de ses idées.
Personne ne peut nier l’apport exceptionnel de Noureddine Saïl dans l’expérience cinématographique marocaine comme critique de cinéma qui a fait le choix de ne pas l’inscrire dans un corpus précis, un admirable orateur qui sait ciseler les mots justes, un théoricien d’un avenir à esquisser pour ce cinéma fragile, un grand défenseur d’un cinéma qui résiste au temps, qui traverse l’esprit avec la vitesse de la lumière.
C’est à lui qu’on doit cet événement louable dédié au cinéma africain, en l’occurrence, Le Festival du Cinéma Africain de Khouribga. Car nous sommes des africains et le cinéma est la mémoire des peuples.
Il n’a pas cessé de réfléchir, avec acharnement, dans l’espoir de mettre en valeur le cinéma marocain et prodiguer tous les moyens possibles pour encourager la production et assurer une diffusion large de ce cinéma.
La présence/absence de Noureddine Saïl – l’homme au multiple visage – aura une tonalité très particulière lors de cette table ronde. C’est l’occasion de rendre un hommage posthume pour un homme si humble mais de haute voltige.