LE TRIANGLE IMPOSSIBLE. DIFFICULTÉS POUR TOUS LES ÉTATS FACE À LA PANDÉMIE. 

« Le triangle d’impossibilité du covid-19 », une étude d’Hubert Kempf, professeur d’économie à l’École Normale Supérieure de Paris-Saclay et à la National Research University Higher School of Economics, Moscou.

Il a examiné et modélisé les réponses (diversifiées avec des résultats contrastés) que les États de la planète ont essayé d’apporter à la pandémie.

Les réponses  ne sont pas « uniformes » car elles sont confrontées à ce qu’il appelle « LE TRIANGLE DES IMPOSSIBILITÉS ».

Les États ne sont pas face à un « dilemme » mais à un « trilemne »… figuré par un triangle comportant 3 sommets avec les paramètres suivants:

1. Maîtriser la pandémie sur le plan sanitaire… minimiser le nombre de décès dus au virus.

2. Assurer une stabilité économique… limiter l’impact de la pandémie sur le fonctionnement de l’économie.

3. Garantir le plus grand respect des libertés publiques et individuelles.

Or, il est impossible  d’atteindre ces 3 objectifs simultanément.  SEULEMENT DEUX peuvent être atteints. Il y aura toujours un objectif sur les trois qui va être sacrifié.

– Les Etats peuvent restreindre les libertés et contrôler le comportement des citoyens (sacrifice des libertés !)… afin de rompre la chaîne de transmission du virus… en essayant de maintenir le processus de production et de distribution des biens et services.

– Les États peuvent limiter au minimum les mouvements des personnes en supprimant les contacts interpersonnels sur les lieux de travail… la pandémie serait bien gérée mais la production sera perdue (sacrifice de l’économie !)

– Les États peuvent laisser les individus et les entreprises fonctionner comme avant. Sans restreindre aucune liberté. La transmission du virus aura le champ libre. Il s’agit là d’une « stratégie d’immunité collective » (sacrifice de la maîtrise de la pandémie !)

En fonction de ces paramètres, les politiques déployées par les États peuvent être classées en 3 catégories :

– Les  « États libertariens » sacrifient la maîtrise de la pandémie pour ne pas limiter les libertés et permettre de travailler « normalement ». C’est la stratégie de l’administration Trump aux USA.

– Les « États autoritaires » sacrifient les libertés et verrouillent les mouvements. Ils parviennent à contrôler la pandémie en limitant les pertes économiques. C’est le cas de la Chine et du Vietnam.

– Les Etats de la « social-démocratie » (les pays européens) qui tentent de maitriser la pandémie en respectant du mieux possible les libertés individuelles. Ils pratiquent un confinement général… mais laissent les individus libres de sortir pour les besoins immédiats. Ils mettent en œuvre des mesures de soutien à l’économie. Ils assurent les revenus en cas de chômage partiel ou généralisé. Cette approche privilégie la sécurité individuelle sanitaire et économique… mais entraîne des « pertes de production ». Elle a un impact considérable sur les finances publiques et l’économie.

Les politiques déployées au Maroc (sécurité individuelle sanitaire et économique) s’inscrivent globalement dans ce 3ème modèle.

Il reste  « impossible » pour tout pays de relever les 3 défis en même temps: maîtriser la pandémie… maintenir les libertés… assurer un fonctionnement normal de l’économie. Un objectif sera nécessairement sacrifié.

Les États arbitrent en fonction de leur histoire, de l’état de leur économie et des mentalités des peuples.

Un vrai « casse-tête », illustré par l’exemple britannique. Le gouvernement de  ‎Boris Johnson a commencé par faire le pari de la « stratégie de l’immunité collective »… et face à la hausse brutale des décès,  il est  revenu à la politique de confinement pratiquée par les pays européens continentaux.

Il n’y a aucun précédent ou une situation antérieure similaire qui aurait permis à la collectivité des Nations d’organiser une RÉPONSE COLLECTIVE à la pandémie.

Le virus est redoutable par sa létalité et par sa capacité à désorganiser l’économie, l’organisation sociale, mais aussi par l’incertitude qui l’entoure. On en sait très peu sur lui: sa résilience, sa capacité de mutation, les propriétés immunologiques qui lui sont associées.

Seuls les scientifiques en fonction du progrès de leur recherche pourront apporter la réponse efficace pour éradiquer la pandémie. Mais quand ?

En attendant, tous les États font des arbitrages très délicats… avec des choix d’un jour qui peuvent être modifiés le jour suivant.

Et bien évidemment les opinions publiques qui ne  maîtrisent pas tous les paramètres de ce « triangle impossible » ont l’impression d’une incohérence de la part des gouvernements.

Enfin, tant qu’une réponse scientifique forte contre le virus n’est pas trouvée, les États seront obligés de faire des arbitrages très difficiles et souvent incompris. C’est là qu’intervient la nécessité d’une communication publique novatrice et efficace.