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Résolution 2797 : quand la diplomatie silencieuse pèse plus que les déclarations — l’abstention russe comme signal stratégique

Par: Marco BARATTO 

Par: Marco BARATTO 

La publication officielle par le Secrétariat de l’ONU du texte intégral de la résolution 2797 sur le Sahara marocain marque un tournant important, à la fois sur le plan diplomatique et sur celui de la clarté juridique. L’Algérie, qui avait tenté de modifier la version arabe en remplaçant la mention neutre « les parties » par « les deux parties », espérait se voir exclue du statut d’acteur direct du conflit. Cette tentative vient d’être définitivement contredite : la version validée par le Conseil de sécurité mentionne bien « les parties » — confirmant la présence de plusieurs protagonistes, et notamment l’Algérie comme partie pleinement impliquée.

Ce n’était pas un simple débat lexical. En cherchant à se masquer derrière une façade d’observateur extérieur, Alger voulait effacer sa responsabilité historique, politique et matérielle dans ce différend régional. Les pressions exercées auprès du Secrétariat ont même retardé de 24 jours la publication officielle — un délai qui a suscité interrogations et critiques, mais qui n’aura finalement servi qu’à souligner l’acharnement algérien.

La publication finale, dans les six langues officielles de l’ONU, rétablit la réalité : ce conflit ne concerne pas deux, mais quatre parties, parmi lesquelles l’Algérie est clairement identifiée. Cette clarification est capitale parce qu’elle met fin aux artifices interprétatifs et réaffirme la légitimité du cadre fixé par l’ONU.

Le point 3 de la résolution est central : il demande aux parties de participer au processus politique sans conditions préalables, sur la base du plan d’autonomie proposé par le Maroc, en soulignant qu’une autonomie véritable constitue la voie la plus réaliste vers une solution définitive et mutuellement acceptable. Le message est clair : l’autonomie marocaine n’est pas une option parmi d’autres — c’est la base de travail retenue par le Conseil de sécurité.

Mais au-delà du texte, il y a le contexte. Dans les résolutions, comme le disait un industriel italien, « les votes ne se comptent pas, ils se pèsent ». Et l’abstention qui pèse le plus lourd est celle de la Russie.

Beaucoup l’ont interprétée comme un geste neutre. C’est une erreur d’analyse. Il s’agit plutôt d’un signal diplomatique discret, mais significatif. La Russie, comme le Maroc, pratique une diplomatie sobre, qui évite les coups d’éclat médiatiques au profit de la patience stratégique. Tolstoï parlait du pouvoir du « temps et de la patience » — une maxime que Moscou et Rabat semblent partager.

Les deux pays travaillent loin des caméras, privilégient le dialogue discret aux annonces tapageuses, et cultivent des relations construites sur la durée. C’est pourquoi l’abstention russe doit être comprise non comme une absence de position, mais comme une marque tacite de compréhension et d’ouverture.

Ce signal s’inscrit dans une continuité historique : la présence de l’Église orthodoxe russe à Rabat dès 1931 en est un exemple peu connu mais révélateur. De même, au sein des membres permanents du Conseil de sécurité, seule la Russie est observatrice auprès de l’Organisation de la Coopération Islamique — un détail qui a son importance.

Tout cela dessine la perspective d’un rapprochement discret mais profond entre Rabat et Moscou. La Russie n’est pas encore allée jusqu’à reconnaître pleinement le Sahara marocain — mais elle a ouvert une porte. Il n’est pas exclu que les mois à venir réservent des développements inattendus dans les relations russo-marocaines, fidèles au style de leurs diplomaties : sobres, patientes et efficaces.

 

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