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Réseau autoroutier : Cap sur la fluidité avant 2030

Une réforme du système de péage s'impose pour mieux préparer le pays à la Coupe du monde 2030

Par: Reda JAALI

Le Maroc dispose d’un des réseaux autoroutiers les plus développés du continent africain. Ce maillage a permis de renforcer les liaisons entre les régions, de stimuler les échanges économiques et de faciliter la mobilité des citoyens. Toutefois, des disparités demeurent dans la manière dont les péages sont répartis et gérés, en particulier sur l’axe stratégique qui relie Tanger à Agadir.

Une simple comparaison avec l’axe Rabat–Oujda suffit à faire ressortir cette inégalité. Sur un parcours de plus de 500 kilomètres entre Rabat et Oujda, l’usager ne s’arrête qu’à deux reprises : une fois à Sidi Allal Bahraoui pour prendre un ticket, et une seconde fois à l’entrée d’Oujda pour payer. Le système y est simple, fluide, lisible. Il repose sur un modèle fermé qui permet une facturation en fonction du kilométrage réel parcouru, sans interruption du trajet.

À l’opposé, entre Tanger et Agadir, l’usager est confronté à pas moins de huit points de péage. Après avoir pris un ticket à Tanger, il doit s’arrêter une première fois à Kénitra Nord pour payer, puis il est freiné à Kénitra Sud, Technopolis (Salé), Bouznika et Tit Mellil, tous équipés de péages ouverts. À Berrechid, un nouveau ticket est délivré, et le paiement final s’effectue à l’entrée d’Agadir. Sur ce parcours, les arrêts sont fréquents, la fluidité du trafic est compromise, et les automobilistes perdent un temps précieux.

Le cas du péage de Bouznika est particulièrement problématique. Lors des périodes de forte affluence, notamment les week-ends, les jours fériés ou pendant les vacances, des bouchons de plusieurs kilomètres s’y forment régulièrement. Ces ralentissements entraînent une surconsommation de carburant, du stress pour les conducteurs, et une congestion générale qui affecte tout le corridor entre Rabat et Casablanca. Un tel point de blocage, sur un axe aussi stratégique, illustre les limites du système de péage ouvert.

Face à ce constat, une réforme s’impose. La proposition consiste à supprimer le péage de Kénitra Sud et à transformer l’axe Rabat-Casablanca en un système fermé. Concrètement, il s’agit de supprimer le péage ouvert de Bouznika, et de permettre aux usagers de prendre un ticket à Aïn Atiq ou au sud de Technopolis, pour ensuite régler à Tit Mellil ou Aïn Harrouda, selon le sens de circulation. Grâce au projet de séparation des voies à Aïn Harrouda, cette réorganisation est désormais techniquement réalisable. Le Pass Jawaz, certes, contribue déjà à fluidifier le trafic et à réduire les files d’attente. Toutefois, la suppression des péages ouverts et la généralisation du système fermé à l’ensemble du réseau, combinée à l’usage du Jawaz, offriraient un trafic encore plus fluide et optimisé.

Un tel changement apporterait de nombreux bénéfices. La suppression des péages ouverts réduirait significativement les arrêts sur l’axe Tanger–Agadir, améliorerait la fluidité, et allégerait la pression sur les points sensibles comme Bouznika. En adoptant une tarification proportionnelle au trajet réellement effectué, ce nouveau système serait aussi plus juste et plus transparent pour les usagers. Moins d’arrêts signifie également moins de pollution, moins d’usure des véhicules, et une meilleure efficacité énergétique, en phase avec les objectifs de durabilité du Maroc.

Surtout, cette réforme revêt une importance stratégique capitale à l’approche de la Coupe du Monde 2030, que le Maroc coorganisera avec l’Espagne et le Portugal. Accueillir un événement d’une telle envergure implique une mobilité fluide, rapide et fiable sur l’ensemble du territoire. Les millions de visiteurs attendus devront pouvoir traverser le pays efficacement, notamment entre les villes hôtes probables comme Tanger, Rabat, Casablanca, Marrakech ou Agadir. Réduire les points de péage et fluidifier les axes autoroutiers devient ainsi une condition essentielle de réussite logistique et d’image internationale.

Au-delà des besoins ponctuels de la Coupe du Monde, cette proposition permettrait également une structuration intelligente du réseau autoroutier national, avec des tronçons fermés bien répartis :

  • Un tronçon nord, de Tanger à Kénitra.
  • Un tronçon est, de Rabat à Oujda, incluant la future connexion au port Nador West Med.
  • Un tronçon centre, entre Rabat et Casablanca, optimisé grâce à proposition de la suppression des péages ouverts.
  • Un tronçon ouest, de Casablanca à Safi.
  • Un tronçon sud, de Berrechid à Agadir, desservant Marrakech et le Grand Sud.
  • Un tronçon centre-est, de Berrechid à Béni Mellal.

Ce maillage offrirait un réseau autoroutier plus lisible, plus équilibré et plus moderne, à la hauteur des ambitions économiques, touristiques et sportives du Maroc à l’horizon 2030.

Il est temps que la société des Autoroutes du Maroc (ADM) reconsidère le modèle actuel. La modernisation du système de péage entre Tanger et Agadir n’exige pas de grands travaux, mais une volonté politique et une logique d’équité territoriale. Il s’agit là d’une réforme simple, concrète, et attendue par des milliers d’usagers quotidiens. Pour un réseau plus fluide, plus juste, et digne d’un pays en mouvement.

 

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