La directrice générale de l’UNESCO, Audrey Azoulay, a « regretté vivement », vendredi, la décision des autorités turques de modifier le statut de Sainte-Sophie.
Mme Azoulay a également fait part de sa « profonde préoccupation » à l’ambassadeur de Turquie auprès de l’UNESCO suite à cette décision « prise sans dialogue préalable », indique un communiqué de l’organisation onusienne.
Le président turc Recep Tayyip Erdogan a annoncé dans la journée l’ouverture de l’ex-basilique à Istanbul aux prières musulmanes, après qu’un tribunal a ouvert la voie à sa transformation en mosquée en annulant son statut actuel de musée.
Sainte-Sophie est une composante des Zones historiques d’Istanbul inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO, un chef d’œuvre architectural et un « témoignage unique » de la rencontre de l’Europe et de l’Asie au cours des siècles, a déclaré la directrice générale de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture.
Son statut de musée reflète l’universalité de son héritage et en fait un « puissant » symbole de dialogue, a-t-elle souligné, citée dans le communiqué.
« La décision annoncée aujourd’hui soulève la question de l’impact du changement de statut sur la valeur universelle du bien. Ainsi, un État doit veiller à ce qu’aucune modification ne porte atteinte à la valeur exceptionnelle universelle d’un bien inscrit sur son territoire. Toute modification en ce sens doit faire l’objet d’une notification préalable à l’UNESCO et, le cas échéant, d’un examen par le Comité du Patrimoine mondial », lit-on dans le communiqué.
L’UNESCO rappelle par ailleurs qu’une participation effective, inclusive, et équitable des communautés et autres parties prenantes concernées par le bien, est une « condition nécessaire » pour préserver ce patrimoine et mettre en valeur son caractère unique et sa signification.
Et d’ajouter que cette exigence sert la protection et la transmission de la valeur universelle exceptionnelle du patrimoine et est inhérente à l’esprit de la Convention du patrimoine mondial.
Ces préoccupations avaient été notifiées à la République de Turquie dans plusieurs courriers et encore jeudi soir au représentant de la délégation turque auprès de l’UNESCO, rappelle-t-on.
A cet égard, il est « regrettable » que la décision n’ait fait l’objet d’aucun dialogue ou notification préalable, relève-t-on de même source, ajoutant que l’UNESCO appelle les autorités turques à ouvrir ce dialogue sans délai, afin d’éviter un recul sur l’universalité de ce patrimoine exceptionnel dont l’état de conservation sera examiné par le Comité du Patrimoine mondial à sa prochaine session.
« Il est important d’éviter toute mesure de mise en œuvre qui ne serait pas préalablement discutée avec l’UNESCO et qui entraînerait des conséquences sur l’accès physique, sur la structure du bâti, sur les biens mobiliers et sur le mode de gestion du site », a souligné de son côté Ernesto Ottone Ramirez, Sous-Directeur général de l’UNESCO pour la culture.
De telles mesures pourraient en effet constituer des violations des règles issues de la Convention du Patrimoine mondial de 1972, note le communiqué.
Convertie en mosquée après la conquête de Constantinople par les Ottomans en 1453, Sainte-Sophie a été transformée en musée en 1934 par le fondateur de la Turquie moderne, Mustafa Kemal Ataturk.