Par: Zakia Laaroussi

Au cœur du Sud-Est marocain, là où le ciel limpide embrasse les dunes d’or, se dresse Rissani, cité légendaire qui refuse l’oubli. Ville empreinte du souffle du passé, elle murmure aux générations les récits d’une grandeur immuable. Berceau de la dynastie alaouite, jadis carrefour des caravanes et sanctuaire du savoir, elle fut l’âme vibrante de Sijilmassa, cette métropole d’antan qui tissait les liens entre le Maroc et l’Afrique profonde.
Aujourd’hui, le palais de Tabouassamt, le palais de Tanguit et du Mamoun, le marché ancestral de Rissani et les illustres zaouïas qui éclairèrent les esprits, se dissipent sous nos yeux comme s’ils n’avaient jamais été les témoins d’une civilisation florissante. Comment accepter que ce joyau, jadis berceau des souverains et refuge des érudits, ne soit plus qu’un silence désolé, racontant avec tristesse les épopées d’autrefois ?
Rissani, une légende qui refuse de mourir
Comparable en prestige aux terres prophétiques de Palestine, Rissani lance aujourd’hui un cri vibrant, un appel à réveiller la mémoire d’un glorieux passé qui vacille sous les assauts de l’oubli et de la négligence. Ce n’est pas un vestige figé dans le temps, mais un héritage vivant, une opportunité inestimable pour un essor culturel et touristique. Sauver ces monuments n’est pas un luxe, c’est une responsabilité nationale et historique. Comment se résoudre à voir le berceau de la dynastie alaouite et le sanctuaire des saints se flétrir sous notre regard indifférent ? Comment permettre à Sijilmassa, cœur battant du commerce transsaharien, de disparaître sans laisser de trace ?
C’est ici que naquit Moulay Ismaïl, ici repose Hassan Ad-Dakhil, fondateur de la lignée alaouite. C’est en ces terres que les caravanes se croisaient, que le commerce rayonnait et que le savoir s’enracinait dans les zaouïas et les kasbahs. Le palais de Tabouassamt, jadis bastion de l’artisanat et atelier de frappe monétaire, n’est plus qu’une ruine murmurante. Les palais de Tanguit et du Mamoun, jadis havres des marchands, musulmans et juifs confondus, qui participèrent à l’essor de Sijilmassa, s’effacent inexorablement.
Allons-nous rester spectateurs de l’effondrement du palais Abhar et de la kasbah des Chorfa ? Allons-nous tolérer la disparition des grands marchés de Sijilmassa, jadis carrefours de richesses et de savoir, à l’image de la zaouïa de Taboubekrt Al-Ghazi et celle d’Al-Mâti ?
Allons-nous laisser cette mémoire vivante se réduire à de simples récits sans empreinte tangible ?
Rissani n’est pas une page tournée du passé, mais une richesse inestimable, une force capable de revitaliser toute une région. Ces vestiges ne sont pas de simples pierres inertes, mais l’âme d’une civilisation qui, si elle renaît, peut insuffler une dynamique nouvelle, économique et culturelle. Comment pouvons-nous posséder le plus ancien marché du Maroc, celui de Rissani, et ne pas le préserver de la décrépitude ? Comment négliger un tel trésor alors qu’il pourrait devenir un moteur économique pour ses habitants ?
Nous aspirons à une renaissance, à une préservation fidèle à son authenticité, à une restauration qui ne dénature pas son essence mais la sublime. Sauver les palais et les kasbahs n’est pas une simple sauvegarde du passé, c’est un pari sur l’avenir : un levier de développement, une source d’emploi, un renouveau touristique, une résurrection culturelle.
Nous demandons la restauration de ces monuments et leur inscription au patrimoine mondial. Nous voulons voir renaître les écoles du savoir ancestral, émerger des hôpitaux dignes des fils de cette terre, et vibrer à nouveau les marchés où affluait jadis la vie. Imaginez un instant ces palais restaurés, transformés en centres culturels et touristiques : les caravanes modernes reviendraient, le commerce s’épanouirait de nouveau, et l’espérance renaîtrait sur les visages des habitants.
Redonner à ce patrimoine sa splendeur n’est pas un luxe, c’est un devoir. Nous avons deux choix : raviver cette mémoire, ou la laisser mourir dans l’indifférence, condamnée à n’être qu’une ombre évanescente d’un temps révolu.
Ceci est un cri venu du tréfonds de l’Histoire… Qui répondra à l’appel?