
Par: Samia Mejrade
Dans le cadre du renforcement de ses capacités navales, le Maroc envisagerait l’achat de deux sous-marins, selon des sources informées. Ce projet, encore au stade des négociations, suscite un vif intérêt auprès de plusieurs constructeurs européens et russe, chacun avançant des arguments techniques, financiers ou géopolitiques pour convaincre Rabat.
France et Allemagne en tête de course
La France, via Naval Group, proposerait ses Scorpène-class, des sous-marins conventionnels présentés comme «furtifs» et «modulaires», capables de s’adapter aux besoins marocains en matière de surveillance côtière. Le groupe français, déjà fournisseur d’une frégate en 2014, mettrait en avant son projet de chantier naval à Casablanca, un atout pour ancrer une coopération industrielle locale.
L’Allemagne, avec ThyssenKrupp Marine Systems (TKMS), défendrait deux modèles : le HDW Dolphin AIP, équipé de technologies d’autonomie prolongée, et le Class 209/1400mod, une version éprouvée mais moins innovante. Ces offres s’appuieraient sur la réputation allemande en ingénierie de précision, bien que moins intégrées dans des projets industriels marocains que la France.
La Russie en embuscade, le Portugal et la Grèce en outsiders
Moscou tenterait de relancer son offre de l’Amur 1650, un sous-marin diésel-électrique de quatrième génération, bien que ce modèle n’ait jamais été vendu à ce jour. En parallèle, le Portugal et la Grèce proposeraient des modèles d’occasion, une alternative économique pour Rabat, qui doit aussi composer avec un budget défense encadré par un recours aux marchés financiers de 10 à 10,5 milliards de dirhams prévu en mars 2025.
L’Espagne, entre vigilance et opportunités
La presse espagnole, traditionnellement attentive aux mouvements militaires marocains, suivrait ces négociations avec un intérêt marqué, alimenté par des tensions historiques autour du Sahara occidental ou des contrôles frontaliers. Si certains observateurs évoquent une méfiance potentielle face au renforcement des capacités sous-marines du Maroc, d’autres y voient une opportunité de collaboration renforcée. Les deux pays partagent en effet des défis communs en Méditerranée occidentale : trafic maritime, migration irrégulière et sécurité des détroits. Une coordination accrue, via des exercices conjoints ou un partage de renseignements, pourrait servir leurs intérêts mutuels, sans nécessairement attiser les rivalités.
Décision sous condition
Aucun choix ne semble arrêté à ce stade. Les critères techniques (autonomie, modularité) et les contreparties industrielles (comme le chantier naval de Casablanca) pèseraient lourd dans la balance, tout comme les considérations diplomatiques. Le Maroc, soucieux de diversifier ses partenariats, devrait aussi ménager ses relations avec l’Espagne, un voisin incontournable.
Si ce contrat se concrétise, il marquerait un saut capacitaire pour la marine marocaine, tout en testant la capacité des pays européens à concilier compétition économique et coopération sécuritaire en Méditerranée.





