Isabelle Werenfels, senior fellow dans la division Moyen-Orient et Afrique de la StiftungWissenschaftundPolitik (Institut allemand des affaires internationales et de sécurité) basée à Berlin, vient de publier une nouvelle « étude » intitulée: « Nous ne voulons pas d’une nouvelle Turquie en Méditerranée occidentale ».
Il s’agit du deuxième rapport de celle qu’on surnomme « l’Iron Woman » (en français: la dame de fer) du « Bundesnachrichtendienst », le service de renseignement extérieur du gouvernement fédéral allemand, placé sous la tutelle de la Chancellerie, après celui de juillet 2021 publié sous le titre: « Rivalités maghrébines sur l’Afrique subsaharienne: l’Algérie et la Tunisie cherchent à suivre les pas du Maroc« .
Ce nouveau rapport aux forts relents anti-marocains, et dont de larges extraits ont été ventilés à la presse allemande, présente le Royaume comme présentant comme « une puissance montante et parfois menaçante », en l’assimilant à « une nouvelle Turquie en Méditerranée occidentale« !!!
L’axe Rabat-Tel-Aviv… « une menace pour l’Allemagne… et l’Union européenne »
Évoquant « l’alliance maroco-israélienne », le rapport d’Isabelle Werenfels fait état de « grand choc pour l’Union européenne et pas seulement pour l’Allemagne ». Selon le rapport, cette alliance constituerait « une menace pour leurs intérêts, à court et moyen terme directement, car l’Afrique du Nord est une une zone fertile pour l’Union européenne pour vendre ses produits et une porte d’entrée pour pénétrer le vaste marché africain ».
« L’accord maroco-israélien nous fatiguera (c’est-à-dire l’Allemagne) d’autant pour les marchés miniers, pour lesquels nous avons défini une stratégie depuis 2019 lorsque nous avons conclu un accord avec plusieurs de nos sociétés pour devenir actifs au niveau africain et nous étions sûrs qu’elles commenceraient clairement à entrer sur ce grand marché en 2020 », estime ledit rapport, relevant néanmoins que la Covid 19 a retardé ce projet, « que notre pays a bien planifié et bien pensé, car nos relations commerciales avec l’Afrique sont encore très faibles ». « Merkel a mis en place un fonds d’un milliard d’euros pour soutenir et sécuriser les investissements en Afrique, l’Allemagne étant à la traîne dans les investissements directs, seuls 1% des investissements étrangers allemands vont actuellement en Afrique », dévoile le document.
Le renseignement marocain, un concurrent féroce et obstiné
Avant l’accord militaire et sécuritaire entre Israël et le Maroc, « nous avons rencontré un service secret marocain fort, un concurrent féroce et obstiné », reconnaît ledit rapport, en pointant les connexions qui seraient tissées non seulement en Europe occidentale mais même en Europe orientale ».
Et d’ajouter: « L’appareil allemand a essayé de créer de nombreux problèmes complexes pour le Maroc et ses activités de mouvement dans de nombreuses parties de l’Afrique au détriment de ses ennemis et concurrents traditionnels dans la région. En vain…
« Terrible siège marocain autour de Sebta et Mélilia »
Le rapport note qu’il y a aussi « la question de la délimitation des frontières maritimes entre le Maroc et l’Espagne, notamment entre les villes de Ceuta et Melilla, qui sont à l’extrême nord du Maroc et sous administration espagnole ».
Le rapport révèle : « Nos rapports confirment que ces deux villes sont sous un terrible siège marocain et que nous devons les aider financièrement et économiquement » car, prétend la même source, « elles font partie intégrante de l’Europe et des marchés stratégiques non seulement pour Madrid mais même pour l’Union européenne »!!!
« Ils (c’est-à-dire Ceuta et Melilla) sont sur le point de s’effondrer et nous appelons donc le gouvernement (allemand) à œuvrer pour le plein soutien de notre allié l’Espagne… », exhorte la même source.
On comprend donc mieux pourquoi l’ambassadeur allemand en Espagne s’est déplacé il y a une semaine dans la ville occupée de Mélilia… Ce n’était sûrement pas pour une promenade de santé…
« Berlin doit entrer en Afrique via l’Algérie »!
Le rapport émet, à la fin, une recommandation à l’intention de l’État allemand: « le Maroc n’est pas enthousiaste à l’idée d’ouvrir un nouveau dossier avec Berlin, il faut donc pénétrer en Afrique via l’Algérie, où l’Allemagne a ses entrées et des facilités dans le domaine économique et même politique ». « L’entrée d’une puissance économique comme Israël en partenariat avec une puissance émergente comme le Maroc ne nous laissera même pas (c’est-à-dire l’Allemagne) une marge d’expansion dans une région riche en minerais dont l’industrie allemande a besoin », indique ledit rapport.
En ce qui concerne la Libye et la Tunisie, le rapport estime qu’ils doivent être « le centre de notre attention », relevant que « le vaste désert qui s’étend à travers la bande « algéro-libyenne » sera une cible réussie pour le projet Desertec en concertation avec nos partenaires »
L’Egypte, elle, est considérée comme « un partenaire fiable pour notre expansion en Afrique de l’Est qui possède d’importantes qualifications minières et énergétiques pour notre pays ».
En mettant encore une fois le curseur sur le Maroc, et seulement sur le Maroc, l’Allemagne compromet davantage ses chances de conquérir une place en Afrique. Quant à l’Algérie, elle ne devrait pas miser un seul rond sur ce pays à la dérive… Autant dire qu’elle se trompe de destination…