
Par: Mohamed KHOUKHCHANI

À l’approche des élections législatives de 2026, la scène politique marocaine entre dans une phase décisive. Si la tradition veut que l’on dresse surtout le bilan du gouvernement, les partis politiques, qu’ils soient au pouvoir ou dans l’opposition, restent peu enclins à une reddition de comptes annuelle. Pourtant, l’année 2025 offre un matériau suffisant pour évaluer les trajectoires des principaux partis et esquisser les scénarios possibles de l’après-2026.
I. Les partis de la majorité : domination institutionnelle, fragilité politique.
1. RNI : la force centrale, mais contestée
Le Rassemblement National des Indépendants (RNI) demeure, en 2025, la force dominante de l’exécutif. Son principal atout réside dans sa maîtrise de l’appareil gouvernemental et son implantation territoriale. Toutefois, cette position de force s’accompagne d’un coût politique : usure du pouvoir, critiques sociales persistantes et distance croissante avec une partie de l’opinion publique, notamment les jeunes et les classes moyennes fragilisées.
2. PAM : partenaire solide, identité floue
Le Parti Authenticité et Modernité (PAM) conserve un rôle central au sein de la majorité. Stable, discipliné et bien implanté localement, il souffre cependant d’un déficit d’identité politique claire. Son positionnement apparaît souvent comme fonctionnel plutôt que programmatique.
3. Istiqlal : héritage et pragmatisme
L’Istiqlal reste un acteur incontournable grâce à son capital historique et son pragmatisme. Il participe activement à la majorité tout en essayant de préserver une marge de discours social. Son défi majeur demeure le renouvellement générationnel et idéologique.
Ensemble, ces trois partis abordent 2026 avec un avantage structurel évident, mais sans véritable enthousiasme populaire.
II. L’USFP : une opposition institutionnelle en quête de souffle.
L’Union Socialiste des Forces Populaires (USFP) reste, en 2025, la principale force de l’opposition parlementaire de gauche.
Bilan politique:
● Présence régulière dans le débat parlementaire.
● Critique structurée du projet de loi de finances et des politiques sociales.
● Leadership stable sous Driss Lachgar.
Limites:
● Difficulté à transformer la critique en mobilisation électorale.
● Ambiguïté stratégique entre opposition ferme et tentation de retour au gouvernement.
● Incapacité persistante à fédérer durablement la gauche.
L’USFP incarne davantage une mémoire politique qu’une dynamique populaire, ce qui limite ses chances de percée majeure en 2026.
III. Le PPS : cohérence idéologique, faiblesse électorale.
Le Parti du Progrès et du Socialisme (PPS) se distingue en 2025 par un discours cohérent, réformiste et critique.
Bilan politique:
● Propositions structurées sur la réforme électorale.
● Discours clair sur la participation citoyenne et la justice sociale.
● Positionnement patriotique assumé sur les grandes causes nationales.
Limites:
● Faible base électorale.
● Impact médiatique supérieur à son poids parlementaire.
● Difficultés à transformer les idées en dynamique populaire.
Le PPS apparaît comme une force d’idées plus qu’une force de conquête, indispensable au débat démocratique, mais marginal dans l’arithmétique électorale.
IV. Scénarios post-électoraux pour 2026.
1. Reconduction de la majorité actuelle. C’est le scénario le plus probable. Les trois partis constitutifs de l’actuelle majirité, le RNI, le PAM et l’Istiqlal conserveraient le pouvoir, avec des ajustements internes.
2. Recomposition centriste.
Entrée possible de l’USFP dans une majorité élargie, au prix d’un affaiblissement idéologique.
3. Opposition structurée USFP–PPS
Scénario politiquement souhaitable mais fragile, faute de confiance et de stratégie commune.
4. Percée relative de la gauche
Amélioration des scores sans accès au pouvoir, ouvrant un cycle de recomposition à long terme.
Conclusion :
Les élections de 2026 ne consacreront probablement pas une alternance, mais elles diront beaucoup sur l’état réel du pluralisme politique au Maroc.
● La majorité part favorite, mais fragilisée.
● L’USFP joue sa crédibilité historique.
● Le PPS confirme sa cohérence, sans encore convaincre électoralement.
La véritable bataille ne sera pas celle des sièges, mais celle du sens politique, dans un pays où l’abstention demeure le premier « parti ».


