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Un monde en recomposition : la multipolarité chaotique de 2025 et l’avenir des pays indépendants

Par: Mohamed KHOUKHCHANI

Par: Mohamed KHOUKHCHANI

 

 

Introduction : 2025, l’année des certitudes brisées

Le monde de 2025 n’a plus rien à voir avec celui que l’humanité avait connu durant la seconde moitié du XXᵉ siècle. La fin de la guerre froide avait laissé croire à un ordre international stable, dominé par un seul pôle : les États-Unis. Mais trois décennies plus tard, le paysage géopolitique se fragmente, se complexifie, et surtout, se dérègle.

La question s’impose désormais : où va le monde, et que deviendront les États jaloux de leur indépendance ?

1. Héritage du XXᵉ siècle : de la bipolarité à l’unipolarité

Pendant près d’un demi-siècle, la planète vivait à l’heure de la bipolarité.
Deux superpuissances organisaient le monde :

● L’Est, sous la direction de l’Union soviétique,

● L’Ouest, mené par les États-Unis.

Tout était pensé, mesuré, négocié sous l’ombre pesante de la confrontation nucléaire. Le modèle était conflictuel, mais paradoxalement prévisible : chacun connaissait sa zone d’influence et ses limites.

1991 : rupture d’équilibre.

La chute de l’URSS, l’indépendance des républiques soviétiques et la révocation du pacte de Varsovie laissent les États-Unis seuls maîtres du jeu international.

Pendant près de vingt ans, Washington impose :

● son économie,

● sa culture,

● ses normes politiques,

● ses guerres préventives,

● son dollar comme monnaie universelle,

● et l’OTAN comme garante de sa stratégie militaire.

Nombre d’États, parfois malgré eux, s’occidentalisent, happés par la logique de la mondialisation.

2. L’émergence d’un contre-monde : BRICS, Chine, Russie, Inde

Au début du XXIᵉ siècle, plusieurs puissances émergentes refusent la logique du monde unipolaire. Elles forment alors un groupement devenu aujourd’hui central : les BRICS.

Des motivations claires.

● la Chine veut un monde où l’économie ne dépend pas du dollar ;

● la Russie veut briser l’encerclement occidental ;

● l’Inde refuse un ordre où elle n’a pas voix au chapitre ;

● le Brésil et l’Afrique du Sud réclament un rééquilibrage global.

Depuis 2023, le groupe accueille de nouveaux membres :
l’Arabie Saoudite, l’Égypte, l’Éthiopie, l’Iran, les Émirats arabes unis…
Chaque adhésion change les équilibres géoéconomiques.

Mais des contradictions internes:

Les BRICS ne sont pas un bloc soudé.
Ils sont unis dans la contestation de l’hégémonie américaine…
… mais profondément divisés dans leurs visions stratégiques.

La Chine et l’Inde se méfient l’une de l’autre ;
Iran et Arabie Saoudite demeurent rivaux idéologiques ;
Russie et Chine poursuivent des objectifs parfois divergents.

3. 2025 : la multipolarité chaotique

Nous ne sommes ni dans un monde bipolaire, ni dans un monde unipolaire.
Nous vivons une multipolarité désordonnée, parfois violente.

Ses caractéristiques majeures :

● Prolifération des conflits régionaux
Ukraine, Gaza, Sahel, mer de Chine.

● Fragmentation économique
Chaines d’approvisionnement remodelées, sanctions, dédollarisation relative.

● Compétition technologique extrême
Intelligence artificielle, semi-conducteurs, cybersécurité, 5G.

● Montée des puissances intermédiaires telles que la Turquie, l’Arabie Saoudite, le Brésil, l’Indonésie, le Maroc, l’Éthiopie.

● Affaiblissement des institutions internationales: l’ONU paralysée, l’OMS contestée, l’OMC impuissante.

Le monde n’est plus structuré par deux blocs. Il est plutôt traversé par plusieurs centres de puissance. Aucun ne parvient à dominer complètement.

4. Les États non-alignés : entre autonomie et vulnérabilité

De nombreux pays refusent aujourd’hui de s’aligner aveuglément sur Washington ou sur le bloc sino-russe.
Ils revendiquent une neutralité active.

Parmi eux :
le Maroc, l’Algérie, l’Égypte, l’Arabie Saoudite, les Émirats, le Qatar, le Brésil, le Mexique, l’Indonésie, l’Afrique du Sud…

Leur défi ? Trouver leur place dans un monde divisé.

Quatre conditions détermineront leur destin :

1) Diversifier les partenariats.

Plus aucun pays ne veut dépendre :

● d’une seule puissance militaire,

● d’un seul fournisseur d’armes,

● d’un seul marché d’exportation,

● ni d’un seul fournisseur numérique.

2) Devenir technologiquement souverains.

L’indépendance du XXIᵉ siècle repose sur :

● les données,

● l’intelligence artificielle,

● l’énergie,

● l’eau,

● les chaînes de production.

Sans cela, aucun pays n’est réellement indépendant.

3) Garantir la stabilité interne

Dans un monde chaotique, ce sont les nations les plus cohésives — politiquement, socialement, institutionnellement — qui résistent.

4) Affirmer une diplomatie équilibrée.

● Refuser le suivisme.
● Refuser les bras de fer inutiles.
● S’imposer comme un intermédiaire plutôt que comme un pion.

5. Où va le monde ?

Vers un système fragmenté où aucune puissance n’est hégémonique.
Vers un monde où :

● les alliances ne sont plus fixes ;

● les conflits peuvent naître sauvagement ;

● l’économie n’est plus globalisée mais régionale ;

● la recherche d’autonomie devient un impératif vital.

Dans ce contexte, les nations jalouses de leur souveraineté peuvent devenir des pivots essentiels, des équilibristes capables de dialoguer avec tous sans se soumettre à personne.

Conclusion : l’avenir appartient aux États intelligents.

Ceux qui sauront :

● diversifier leurs alliances,

● maîtriser leurs technologies,

● stabiliser leurs sociétés,

● et pratiquer une diplomatie polyvalente,

seront les gagnants de l’ère multipolaire.

Le monde de 2026 ne sera ni américain, ni chinois, ni russe.
Il sera polycentrique, instable, et dominé par les pays capables de naviguer entre plusieurs centres de pouvoir.

Les autres seront emportés par la tempête.

 

 

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