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Gifle à un Caïd: Le dérapage de trop

Par: Zakia Laaroussi 

J’ai senti ma gorge se nouer en visionnant cette scène révoltante : une femme, saine d’esprit et dotée de toutes ses facultés, osant gifler un Caïd, comme si elle se trouvait en plein affrontement avec un oppresseur colonial ! Quelle ignominie !

D’abord, j’ai cru avoir affaire à une ignorante du droit le plus élémentaire, ou peut-être à une personne « enivrée par un excès de puissance », incapable de concevoir l’ordre autrement que par la transgression et la révolte.
Mais très vite, j’ai compris qu’il ne s’agissait pas d’un simple écart de conduite. Nous assistons à un effondrement moral et éthique où l’on justifie l’agression contre la loi et ses garants au nom d’une  prétendue liberté, comme si l’autorité qui protège la nation était devenue une honte !

 

 

Ibn Khaldoun, dans sa célèbre Muqaddima, affirme : « Le pouvoir ne peut atteindre la grandeur qu’à travers la force et la cohésion, et le souverain ne peut asseoir son règne que par la crainte et le prestige. » Autrement dit, un État ne se construit pas sur l’indulgence et la compromission, mais sur une force légitime et ordonnée, garantissant l’équilibre entre droits et devoirs.

De son côté, Al-Jahiz nous met en garde contre le chaos en écrivant: « Il n’y a pas de règne sans armée, pas d’armée sans richesse, pas de richesse sans peuple, et pas de peuple sans justice. »

L’autorité n’est donc pas un privilège, mais le socle même de la stabilité nationale, et quiconque s’attaque à ce fondement sape la structure même de la justice et de la sécurité.

Hélas, nous semblons avoir basculé dans une époque où certains réduisent la liberté à l’anarchie et l’outrage, comme si insulter, gifler et défier l’ordre étaient devenus des médailles d’honneur ! La Liberté ne signifie pas anarchie, et l’agression ne doit pas devenir un droit autoproclamé.

Plus l’État fait preuve de souplesse dans l’application des lois, plus certains se permettent d’aller toujours plus loin dans l’irrespect et la rébellion. Qui, il y a encore quelques années, aurait osé humilier un agent de l’État en pleine rue ? Qui aurait imaginé que gifler un représentant de l’autorité susciterait des applaudissements au lieu d’une condamnation unanime ?

La liberté n’est pas le chaos, et la dignité ne réside pas dans l’outrage aux lois, mais bien dans leur respect et dans la revendication de réformes par des voies légitimes. Comme le dit un autre proverbe marocain : « Ce n’est pas parce qu’on élève la voix qu’on devient un lion ! »

Autrement dit, hausser le ton ou lever la main ne confère ni courage ni légitimité, mais bien souvent ne fait qu’exposer l’ignorance et la faiblesse de celui qui s’y adonne.

Que l’on ne se méprenne pas : nul ne prétend que les figures de l’autorité sont infaillibles ou exemptes de tout abus. Mais la solution réside-t-elle dans la violence ? Souhaitons-nous vivre dans une jungle où seul le plus fort impose sa loi ?

L’agression contre un représentant de l’État ne relève pas d’un simple incident isolé. C’est un défi lancé à l’ordre institutionnel tout entier.

Un autre adage marocain nous avertit : « Un seul poisson pourri peut infecter tout le panier. » Autrement dit, lorsqu’une seule transgression est tolérée, c’est l’ensemble du système qui risque la corruption. Et si demain, d’autres citoyens, inspirés par ce précédent, choisissent d’exercer leur propre justice, alors nous aurons ouvert la boîte de Pandore d’une société livrée à l’arbitraire et à l’instabilité.

À ce sujet, Aristote nous met en garde : « Là où la loi cesse d’être respectée, commence la tyrannie. »

Si nous permettons que l’autorité soit bafouée parce que nous désapprouvons certaines de ses actions, alors nous ouvrons la voie au chaos sous prétexte de liberté. Nul citoyen n’est libre sans la loi.

Un dernier proverbe marocain nous rappelle une vérité implacable: « Le feu ne prend jamais tout seul. » Ce qui signifie que les crises ne surgissent pas sans raison. Aujourd’hui, l’attaque contre l’autorité ; demain, ce seront les droits des citoyens eux-mêmes qui seront menacés. Nous ne sommes pas face à une simple altercation entre un agent de l’État et une citoyenne, mais devant un affrontement plus vaste entre la légitimité de l’ordre et la montée de la démagogie populiste.

Personne n’est au-dessus des lois, ni l’individu ni l’autorité. Mais sommes-nous entrés dans une ère où le droit et la violence sont mis sur un pied d’égalité ? N’est-il pas temps de redéfinir la liberté et la dignité, en leur redonnant leur sens véritable ?

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