SAFI, « L’AÏTA » OU LE CRI INAUDIBLE D’UNE VILLE EN DÉTRESSE

Dans le flot incessant des informations qui tombent sur le fil, une « nouvelle » m’a particulièrement interpellé. Tenez, le Festival national de l’Art de l’Aita, après une trêve de deux ans pour cause de coronavirus, reprend ses quartiers d’été à Safi (du 27 au 30 juillet).

Ma fascination pour cet art ancestral, né à la fin du XIXème siècle à El Hasba (communauté de Safi) avant de pousser ses ramifications dans d’autres régions du pays, n’aurait d’égale que ma colère contre cette incurie dont la capitale des Abda continue de pâtir. Je suis sidéré que cette ville si belle et si généreuse fasse parler d’elle « INIQUEMENT » à travers les « Ayouts », si envoûtants soient-ils. 

C’est bien de valoriser cette part vivante de notre patrimoine musical, dont la valeur artistique et historique est indéniable. C’est bien aussi d’encourager les héritiers de Kharboucha, Fatima Zehhafa, Fatna Bent L’Houcine, L’Hamounia, Khadijah Mergoum, etc, sans lesquels cet art aurait sombré dans les gouffres de l’amnésie.

Seulement voilà, il y a d’autres « ayouts » auxquels il faut tendre aussi une oreille attentive. Je pense à la céramique et à la poterie, dont le rayonnement a dépassé les frontières nationales. Un simple tour du côté du quartier Bab Chaâba, QG des artistes-potiers, suffit pour constater, la mort dans l’âme, comment le génie de nos ancêtres est en train de s’éteindre cruellement. 

 

 

 

 

 

 

Jadis capitale de la sardine, Safi n’a plus que les yeux pour pleurer. Et pour s’en apercevoir, il n’est qu’à se rendre du côté de Jorf Lihoudi, quartier hôte des usines de poisson et surtout du complexe chimique (Maroc-chimie), à l’origine d’une véritable catastrophe écologique.

Ville historique, Safi est en train de perdre aussi ses monuments. Kasr-al-Bahr (Château de mer) s’est  effondré, les vieilles pierres du quartier « Trab Sini » résistent à peine à l’usure du temps et à la négligence des hommes, « Al Manara » (phare situé à proximité de Borj Nador » ne brille plus des éclats d’antan… 

Un état injuste et incompréhensible, de surcroît indigne de l’histoire et de la beauté d’une ville qui, au regard de son littoral, sa flore et sa faune, aurait pu être un bijou touristique. 

Hélas!