Le débat sur l’aide étatique à la presse fait couler de l’encre et de la salive. Les annonces de Mehdi Bensaid, ministre de la Communication, et de Fouzi Lekjaâ, ministre chargé du Budget, lors d’une récente réunion « consultative », ont suscité l’appétence de certains qui ont fait du journalisme un outil pour s’enrichir mais aussi les appréhensions d’autres qui ont fait le choix de vivre de leurs plumes. Ces derniers, ô Sainte Ingratitude!, continuent de prendre le taureau par les cornes alors que d’autres n’en finissent pas d’extraire du lait des mamelles de la vache.
Le paradoxe est affreusement criant: ceux qui ont le métier n’ont pas de moyens et ceux qui n’ont pas le métier ont les moyens!!!
Voilà une vraie question que certains « représentants » auto-proclamés de la presse n’ont eu ni l’honnêteté ni l’audace de soulever.
Tout n’est pas beau dans « le plus beau métier du monde » qui, comme dirait l’autre, est devenu « le métier des gens qui n’ont pas de métier ». Signe des temps, les « diplômes » sont pour les postulants ce que les frigos sont pour les clients de Derb Omar.
Parler aujourd’hui de « modèle économique » pour « l’entreprise de presse » qui n’a jamais réellement existé, excepté dans la tête de certains plus soucieux de garnir leurs comptes bancaires que leurs tableaux de chasse journalistiques, revient à mettre la charrue avant le boeuf.
Parlons clair, parlons vrai: réduire la crise de la presse au Maroc à son seul aspect sonnant et trébuchant, revient à passer à la trappe la question de fond. Laisser la profession aux professionnels. On ne peut s’improviser pilote de ligne sans avoir accumulé un nombre important d’heures de vol. On ne peut s’autoproclamer médecin sans jurer d’être fidèle aux lois de l’honneur et de la probité. On ne peut non plus s’auto-décréter « journaliste » quand on n’a pas « le métier » et les valeurs morales, pour faire un usage sain du « 4ème pouvoir ».
Le journaliste n’est pas un juge pour se permettre de condamner qui il veut, non plus un délateur, un maître-chanteur, encore moins un courtisan, il ne saurait accepter de devenir non plus un « lupanar » de l’insignifiance, du néant sentimental, intellectuel, devenu hélas le marqueur de cette belle époque de rien.
Il faut -excuser l’évidence!- rendre le métier à ceux qui ont le métier, ne pas permettre que ce métier soit détourné à des fins autres que celle de relater les faits, les vérifier, les analyser, les mettre en perspective, avant de les inscrire dans un partage utile avec le lecteur.
Les moyens, on peut en trouver partout. Pas les professionnels, qui ne courent pas les rues. Qui ont assez de respect pour leurs lecteurs pour courir après de fausses gloires ou des privilèges éphémères.