Avant la diffusion de la vidéo des deux globetrotteuses françaises, Moha n’était qu’une personne inconnue. Un simple berger qui a hérité ce métier ancestral et dur, habitant au douar Tilmi niché au Haut Atlas au Maroc. Il est pauvre mais digne. Le destin a fait que son chemin a croisé celui d’Olivia et de Charlie. Une histoire qui va marquer les Marocains au point où une mobilisation spontanée a donné lieu à un post dédié à Moha sur le réseau social Facebook afin de lui rendre un hommage digne de cet homme dont la devise est: simplicité et générosité.
C’est l’histoire d’un geste majeur d’un homme qui offre le pain tout en invitant les deux françaises à l’accompagner sur un chemin difficile pour rejoindre son père à son campement, en lui apportant de quoi vivre pendant la période de transhumance. Malgré la méfiance au départ, car dans l’esprit de notre temps rien n’est gratuit. Moha va jusqu’au bout pour souhaiter à la fin de l’histoire un bon retour aux deux touristes françaises.
Le geste de Moha avait l’effet d’une catharsis. Il a gommé un point noir qui n’a pas cessé de ternir notre image. Car en 2018, le 17 décembre plus exactement, le Maroc s’est réveillé sur un choc sans nom, en apprenant l’assassinat de deux touristes, dans une vallée du Haut-Atlas. Il s’agit de Louisa Vesterager Jespersen, une Danoise de 24 ans, et de Maren Ueland, une Norvégienne de 28 ans.
Cette histoire sordide orchestrée par des fanatiques aveuglés par une lumière sombre avait le goût amer d’une trahison. C’était une journée particulière où les Marocains ont exprimé leur indignation et leur colère contre cette barbarie étrange à notre à notre pays et à ses valeurs. Sur les réseaux sociaux, ils ont placardé les photos de deux femmes en guise de solidarité avec leur famille. Cela dit, Moha nous a aidé à faire le deuil et à retourner cette triste page. Le fardeau d’un tel drame s’est dissipé à la lueur de ce regard généreux envers l’autre.
Moha nous rappelle aussi un Dersou Ouzala, ce personnage magnifiquement représenté dans le film portant le même nom d’Akira Kurosawa en 1975. Un homme simple aimant la nature, respectueux de ceux qui l’entourent. Il devient le guide d’un officier du tsar, Vladimir Arséniev en plein Taïga russe. Cet homme va nous apprendre l’amitié, la sagesse et l’écoute. Il devient le guide spirituel et le sauveur. Ce rapprochement entre ces deux hommes nous renseigne plus sur une réalité qui existe dans cette partie de notre pays qu’on appelle le Maroc profond.
Moha n’a fait rien d’exceptionnel. Il était authentique, c’est son humanité qui a parlé pour lui. Malgré la pauvreté et la nécessité, il était riche par ses valeurs de partage et de générosité. Donner sans contrepartie. C’est la marque de fabrique d’un Maroc qui se veut une terre de rassemblement et de paix. Et parfois, il faut savoir donner et savoir recevoir.