
Dans un article publié sur le site « focus mediterraneo », le politologue italien Marco Baratto appelle Rome à sortir de sa zone grise et rallier sans tarder les 24 autres pays européens appuyant le Plan d’autonomie marocain comme unique solution au conflit régional créé autour du Sahara. Voici in extenso son article.
Par: Marco BARATTO ★

Au cours des vingt-six dernières années, le Maroc a résolument mené une politique de pacification et de reconnaissance internationale de sa souveraineté sur les provinces du Sud, une action qui rappelle l’esprit de la « Marche verte » historique. Cette approche progressive mais cohérente a conduit à une consolidation progressive de la présence marocaine au Sahara occidental, soutenue par un plan d’autonomie avancé qui a recueilli le soutien d’une grande partie de la communauté internationale.
Le Roi Mohammed VI a clairement poursuivi l’œuvre de son père, feu S. M Hassan II, en déployant une vision qui a façonné une véritable Renaissance marocaine. Après l’indépendance et la Marche verte de 1975, le Maroc a poursuivi un processus d’ancrage institutionnel et de développement territorial dans les provinces sahariennes, faisant de ce projet une composante essentielle de l’identité nationale. Aujourd’hui, le plan d’autonomie avancé proposé par Rabat représente la seule solution politique réaliste et crédible pour résoudre le différend autour du Sahara occidental. De plus en plus de pays à travers le monde reconnaissent la validité de cette approche, la considérant comme un outil efficace pour contrer les pressions d’acteurs extérieurs qui compromettent l’unité nationale du Royaume et alimentent l’instabilité dans une zone géostratégique cruciale.
Parmi les partisans de cette initiative figurent de grandes puissances comme les États-Unis, la France et le Royaume-Uni, membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies. Même l’Espagne, historiquement impliquée dans la question du Sahara, a changé de cap, adhérant à la vision marocaine et soulignant l’importance du plan d’autonomie. En Europe, 24 des 27 États membres de l’Union européenne partagent la même position, à l’exception de l’Italie. Plus de 123 États membres des Nations Unies soutiennent désormais ouvertement l’initiative marocaine. Le dernier membre en date, par ordre chronologique, est la Macédoine du Nord, qui a déclaré son soutien au plan d’autonomie le 20 juillet.
Témoignant d’un changement tangible sur le terrain, plus de trente pays africains, arabes et latino-américains ont ouvert des consulats dans les villes sahariennes de Laâyoune et Dakhla, une reconnaissance sans équivoque de la souveraineté marocaine sur la région. Cependant, l’Italie semble être restée dans une position stratégique d’attentisme, incapable d’adopter une position claire. Cette attitude suscite une irritation croissante à Rabat, partenaire historique de notre pays, qui attend depuis des années un signal politique concret de Rome. Parallèlement, l’Italie a progressivement déplacé son attention au Maghreb vers Alger, un choix justifié par la nécessité d’assurer sa sécurité énergétique après la crise russo-ukrainienne. Mais ce déséquilibre risque de se transformer en un désalignement diplomatique, non seulement avec ses partenaires nord-africains, mais aussi avec la plupart de ses alliés européens. La politique étrangère italienne semble davantage axée sur la réactivité aux contraintes énergétiques que sur une vision stratégique à long terme. De fait, la relation avec l’Algérie ne garantit pas automatiquement un traitement préférentiel, ni de solides garanties à long terme. Au contraire, elle risque de réduire la précieuse marge de manœuvre de l’Italie sur d’autres fronts régionaux.
Depuis des décennies, le Maroc est un partenaire stable et stratégique de l’Italie en Méditerranée et en Afrique. Les liens historiques, économiques et culturels entre les deux pays constituent une base solide pour bâtir une coopération structurée. Ignorer le nouvel ordre géopolitique qui se dessine au Maghreb revient à renoncer à un rôle actif dans l’élaboration des futurs équilibres de puissance de la région. Les choix dictés par des besoins contingents, comme l’approvisionnement énergétique, ne doivent pas compromettre les alliances stratégiques à long terme.
Une profonde refonte de la stratégie italienne en Afrique du Nord est nécessaire. Rome doit sortir de la « zone grise » et recouvrer sa souveraineté diplomatique, en réaffirmant une approche autonome et cohérente, tenant compte des évolutions réelles sur le terrain et des dynamiques internationales. Alors que le monde bouge, l’Italie reste immobile et risque d’être exclue de questions cruciales pour la stabilité et la prospérité de l’ensemble du bassin méditerranéen.
Reconnaître la validité et la légitimité du plan d’autonomie du Maroc ne signifie pas prendre parti sans critique, mais plutôt accepter une réalité consolidée qui a fait l’objet d’un large consensus mondial. Cela signifie également restaurer la dignité d’une relation bilatérale qui, au fil des ans, a apporté des avantages concrets aux deux pays. Il est donc temps de rétablir le dialogue avec Rabat et de restaurer une relation structurée fondée sur la confiance, la coopération et le respect mutuel. L’Italie ne peut se permettre de rester à la traîne. Si elle veut retrouver son rôle de leader en Afrique du Nord et, plus largement, dans la région méditerranéenne, elle doit sortir de toute ambiguïté et adopter une position claire. Dans un monde en mutation rapide, la neutralité passive est un choix lourd de conséquences. Et il risque de s’avérer coûteux.
★Marco Baratto, politologue italien, auteur du livre « Le défi de l’Islam en Italie »





