Lettres de Paris: Urgence culturelle (Par: Zakia Laaroussi)

Par: Zakia Laaroussi*

Les qualités de la plume, telles que décrites par Ibn Nabaté Al-Masri, en font la langue de la littérature et l’instrument des rois dans leurs ambassades avec leurs sujets. Elle est l’outil pour rédiger des missives, consigner des décrets, et par l’encre de sa noirceur, attirer les lumières et les positions. Elle est le défenseur des États, réfutant les arguments de leurs ennemis et s’engageant pour leurs intérêts. Elle est un bien comme les paroles du langage ; avec elle viennent la connexion, le don et la paix. En leur continuité, il y a union et stabilité, plutôt que destruction et dispersion.

C’est dans cet esprit que je m’adresse, au nom des membres de la communauté marocaine, à Sa Majesté, que Dieu le protège, et aux autorités concernées, pour leur demander de concentrer tous les efforts sur la culture, l’encre noire et l’art comme piliers de la puissance et de la jeunesse de son trône en diaspora.

Nous vivons en diaspora une période politique qui ne suscite pas la tranquillité mais plutôt la colère des quatre éléments, attisant des vents annonciateurs de catastrophes, de conflits, de censure, de rupture et de déclin. Nous avons besoin de renforcer les liens entre nos enfants et leur patrie et leur culture. Cela ne pourra se faire qu’en établissant un dialogue continu sous ses formes culturelle, historique et littéraire, à travers la création d’un CENTRE CULTUREL A PARIS représentant le patrimoine de notre pays et servant de référence pour les membres de la communauté.

Dieu a honoré la culture et la plume dans Son Livre en disant: « Par la plume et ce qu’ils écrivent, tu n’es pas, par la grâce de ton Seigneur, un fou. » Et Il a dit, dans Sa puissance : « Lis, et ton Seigneur est le plus généreux, qui a enseigné par la plume, a enseigné à l’homme ce qu’il ne savait pas. » La culture et la plume sont destinées à la perfection de la connaissance et aux valeurs de la sagesse et de la politique. Elles sont puissantes dans le combat.

Nous avons plus que jamais besoin de cette relation entre nos enfants et leur patrie, avec l’essor de l’extrême droite représentée par Marine Le Pen, qui expose nos enfants à la nudité, aux larmes et à la répression médiatique. La protection par la culture peut couvrir cette nudité, combler leur ignorance, apaiser ceux d’entre eux qui ont soif et prévenir les dangers de ces changements géopolitiques et de la crise économique mondiale. Cela pourrait entraîner une rupture entre la génération de nos jeunes et les racines de leur pays, fermant les portes de la connexion avec ses gloires anciennes et modernes.

La création d’un centre culturel à Paris sera la force et la solidité représentant le renforcement des relations de nos enfants avec notre cher Maroc, en tant qu’outil et moyen culturel et en repoussant l’agresseur par le langage de la science, de la lumière et de la compréhension. Nos enfants doivent être fiers des trésors de leur patrie et cela doit se manifester chez eux de la plus belle manière, comme un rayon de soleil et une lumière dans la nuit de leur émigration.

Comme l’ont dit certains philosophes: « L’homme est naturellement attaché à sa patrie. » Tout ignorant de sa patrie et tout étranger est comme un orphelin privé. Ne déstabilisez pas nos enfants, mais ancrez-les et fortifiez les germes de leur patriotisme. Suivez l’exemple des Arabes qui, comme l’a dit Al-Jahiz, « quand ils guerroyaient ou voyageaient, emportaient avec eux un peu de la terre de leur pays qu’ils respiraient en cas de maladie ou de mal-être. » Ne laissez pas leur emblème être le vide et leur couverture le néant, avec des qualificatifs dénigrants comme « Zmaâkrya ». Couvrez-les plutôt du manteau de l’amour de la patrie au lieu du manteau du vent.

Nombreuses sont les régions marocaines qui dépendent de leurs expatriés (dont ma région, l’Oriental). Renouvelez les promesses de sécurité et d’action en faveur de la réconciliation avec les membres de la communauté, en mettant l’accent sur l’éloquence de la culture et les capacités de l’art, offrant plaisir aux oreilles et aux yeux, en créant un centre culturel qui accueille tout le monde sans exception. La culture est un ventre qui englobe toutes les couleurs et toutes les classes sociales. C’est un outil de travail et de parole permettant d’élever sans abaisser. Par elle, le Marocain en terre d’exil est fier de sa patrie et contribue à la construction de son économie, suivant les traces de ses ancêtres en investissant dans les années à venir et en faisant revivre une mémoire historique qui a perdu, voire oublié, ses compétences et ses habiletés parmi la nouvelle génération de migrants.

*Poétesse marocaine basée à Paris.