Le coup de force perpétré, mercredi, par l’ex-président péruvien Pedro Castillo aura duré quelques heures seulement avant que le Congrès ne renverse la situation et que la police ne place en détention l’ex-chef d’Etat, mettant un terme à une tentative de « coup d’Etat » contre l’ordre constitutionnel au Pérou.
Voici dix points clés pour comprendre le déroulement d’une journée de vive tension qui a conduit au coup de force désespéré de Pedro Castillo :
1 – De manière inopinée, Pedro Castillo adressa un message via la télévision dans lequel il a annoncé la dissolution du Congrès et l’instauration de l’Etat d’exception assorti d’un couvre feu nocturne. Il avait aussi annoncé des élections anticipées pour élire un nouveau Congrès doté de prérogatives plus large afin de changer la Constitution ;
2 – Cette annonce a été faite au moment où le Congrès dominé par l’opposition s’apprêtait à voter une motion de destitution du chef de l’Etat pour « incapacité morale permanente » et des actes présumés de corruption. Castillo fait également l’objet de cinq enquêtes, quatre pour corruption présumée et une autre pour plagiat de sa thèse de maîtrise il y a dix ans ;
3 – La manœuvre de l’ex-président Castillo visait à couper l’herbe sous les pieds du Congrès et l’empêcher de siéger en plénière, parce qu’il était certain qu’il allait être destitué. Il est évident que le Congrès s’attendait à cette manoeuvre de l’ex-président et certains observateurs ont même avancé que le Parlement voulait le pousser à commettre cet acte anti-constitutionnel pour le destituer ;
4- Les réactions de rejet de la dissolution du Congrès par Castillo ne se sont pas fait attendre. Plusieurs ministres du gouvernement sortant et des ambassadeurs péruviens auprès des organisations internationales ont démissionné en protestation contre le coup de force de l’ex-chef de l’Etat. Ils ont refusé que leurs noms soient associés à une action contre l’ordre constitutionnel ;
5 – La majorité des forces politiques du pays ont dénoncé le “coup d’Etat” tenté par Castillo, mais c’est la position exprimée par le Commandement conjoint des Forces armées péruviennes qui a définitivement scellé le sort de l’ex-président. L’armée a exprimé à travers un bref communiqué son “respect de l’ordre constitutionnel”, son attachement aux institutions démocratiques et son refus de la dissolution du parlement ;
6 – Quelques heures plus tard, le Congrès encerclé par les forces de l’ordre a voté à une large majorité la destitution du président. Ce vote est le troisième du genre après l’échec de deux autres tentatives de destitution faute de majorité au Congrès. La motion a recueilli une majorité de 101 voix. Seuls 6 députés ont voté contre.
7 – Peu de temps après, des images de l’ex-président en détention dans les locaux de la police péruvienne ont commencé à circuler. On y voyait également le procureur général, Patricia Benavides, en train de lire à l’ex-président les chefs d’inculpation qui pesaient sur lui pour avoir tenté de dissoudre le parlement ;
8 – Dans la région latino-américaine, les réactions de rejet du coup de force de Castillo ont été presque unanimes. Les leaders latino-américains, les Etats Unis et les organisations régionales ont rejeté la manoeuvre de l’ex-président contre le Congrès et appelé les péruviens à préserver les acquis démocratiques ;
9 – Peu de temps après l’arrestation de l’ex-président, la vice-présidente Dina Boluarte, qui avait rejeté le coup d’Etat tenté par Castillo, a prêté serment en tant que première femme présidente du Pérou, lors d’une séance plénière au Congrès. Elle a promis de préserver l’ordre constitutionnel et a demandé au Congrès une période de grâce pour corriger les entorses commises par son prédécesseur ;
10 – Le parquet péruvien a ouvert une enquête préliminaire contre Pedro Castillo pour les délits de “rébellion et complot” qui viendront s’ajouter aux autres accusations contre lui. Si ces accusations sont confirmées, l’ancien président pourrait être renvoyé derrière les barreaux pour plusieurs dizaines d’années.