Le porte-parole du gouvernement Mustapha Baitas a affirmé, hier jeudi, que le gouvernement a le droit de retirer du parlement le projet de loi relatif à la réforme du code pénal. Il faut rappeler que ce projet était bloqué depuis 2016 par les composantes de la majorité précédente qui l’avaient pourtant présenté à la chambre des représentants.
L’actuel Exécutif et l’ancien justifient cette hérésie parlementaire par la nécessité de réviser le texte dans son intégralité. Or la réalité est tout autre car ce blocage porte, essentiellement, sur l’article 256-8 relatif à l’incrimination de l’enrichissement illicite qui stipule: « Toute personne soumise à la déclaration obligatoire du patrimoine dont la situation financière ou celle de ses enfants mineurs connaît une hausse substantielle et non justifiée en comparaison avec ses revenus légitimes est passible d’une amende de 100.000 dirhams à 1 million de dirhams assortie de la confiscation des biens injustifiées et de l‘interdiction d’exercer toute fonction publique ».
Ce texte pourtant équilibré et qui n’instaure pas des peines privatives de liberté a fait peur à nos politiques, ministres, hauts fonctionnaires et fonctionnaires assujettis à la déclaration du patrimoine. Les lobbys ont infiltré les partis de la majorité dont les députés au sein de la commission de la justice ont réussi à bloquer ce texte pendant cinq ans avant qu’il ne soit définitivement retiré du circuit parlementaire par le gouvernement d’Akhannouch.
Autant dire qu’il existe dans notre pays une force très influente qui s’oppose à l’incrimination de l’enrichissement illicite qui est pourtant un outil indispensable pour combattre la corruption. Ce projet de loi est tout aussi coercitif que préventif car il s’attaque à la corruption en amant avant qu’elle ne soit effective contrairement à d’autres instances de la lutte contre la corruption.
Car toute personne assujettie à la déclaration du patrimoine saura que tout bien indument acquis apparaîtra dans ses comptes ou dans ceux de ses enfants.
Il est vrai qu’il n’est pas facile de contrôler toutes les déclarations obligatoires de patrimoine et encore moins d’en déterminer les biens acquis illégalement. Mais ces obstacles sont communs à l’application de toute loi nouvelle car il faut du temps ainsi que des moyens humains et financiers à l’instance chargée de ce contrôle pour roder le processus. Autant dire que le seul obstacle qui se dresse à ce projet de loi demeure son adoption par les parlementaires qui s’élèvent contre la corruption et s’opposent au meilleur mécanisme pour la combattre.