PAR NABIL DRIOUCH*
Le ministre des Affaires étrangères espagnol, José Manuel Albares, s’efforce de cacher la poussière sous le tapis en multipliant les déclarations de bonnes intentions et les allégations sur une prétendue « solidité » des relations hispano-marocaines. On ne va pas loin avec des paroles creuses et de beaux discours distribués à tout vent.
Parlons clair, parlons vrai: Madrid n’a franchi aucun pas concret vers la réconciliation, elle n’a entrepris aucun geste susceptible d’aider les deux pays à tourner la page de la dernière crise. Et ce ne sont surtout pas les faits qui diront le contraire. Toujours est-il que Madrid animée de mauvaise foi agit contre les intérêts de son voisin du sud.
Depuis de longues semaines, nous assistons à une campagne menée tambour battant à travers les médias, ou via des rapports en trompe-l’oeil, pour tenter de diaboliser le Maroc. Cette campagne hystérique n’émane pas uniquement du parti d’extrême-droite espagnole qui a interpellé dernièrement, par la voix d’un membre dirigeant, Me Javier Ortega Smith, le chef d’état-major de l’armée espagnole sur une prétendue menace marocaine pour l’Espagne. Une allégation démentie par ce dernier.
Ce démenti n’a toutefois pas empêché le landerneau médiatico-politique de continuer à présenter le Maroc comme une menace directe pour le royaume ibérique, avec le même esprit qui a prévalu lors de la tristement célèbre Reconquista (nom donné à la période du Moyen Âge durant laquelle s’est produite la reconquête, par les royaumes chrétiens, des territoires de la péninsule Ibérique et des îles Baléares occupés par les musulmans).
Il n’est pas étonnant de voir cette machine infernale surfer sur la vague de l’émigration clandestine pour tenter de nuire à l’image du Maroc, auprès de l’Union européenne, mettant à contribution le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrel, pour distiller le venin de Madrid sur le Maroc et tenter de brouiller Rabat avec Bruxelles. On se rappelle la tempête soulevée, dans les travées de l’UE, par l’Espagne autour des événements de Sebta, dans le dessein perfide de camoufler le scandale lié à l’accueil, le 18 avril dernier, du chef des milices séparatistes, le dénommée Brahim Ghali, dans un hôpital de Saragosse. L’Espagne avait alors passé à la trappe tous les efforts consentis durant des décennies par le Maroc pour endiguer l’hémorragie migratoire.
Ce qui est par contre étonnant, c’est le silence de tombe observé par cette même machine médiatique espagnole sur le rush des migrants clandestins algériens vers la péninsule ibérique.
Mais passons, car il y a grave encore. Au moment où M. Albares jouait la partition de « l’excellence » des relations hispano-marocaines, des mains invisibles étaient prises à préparer la visite provocatrice de l’ambassadeur d’Allemagne en Espagne dans la ville occupée de Mélilia. Par cette action, Madrid voulait jouer la carte allemande contre le Maroc mais elle a plutôt démontré l’inverse. Cette action trahit plutôt l’impuissance de Madrid qui, à chaque crise avec le Maroc, à l’instar d’un enfant en pleurs, se jette dans les bras de l’Union européenne et ses puissantes capitales.
La misère intellectuelle rampante en Espagne a gagné aussi ses think tank qui brillent par une incapacité pathétique à saisir les nouvelles réalités géopolitiques qui se dessinent en Méditerranée occidentale, à assimiler le rôle clef du Maroc à l’échelle de la région, surtout après la reconnaissance par les États-Unis de la souveraineté du Maroc sur ses provinces sahariennes, confirmée par l’administration Biden.
Madrid doit comprendre qu’à travers cette attitude inamicale, elle agit contre ses propres intérêts. Elle se ridiculise davantage en continuant de soutenir la thèse algéro-séparatiste, comme en témoigne le « prix » décerné récemment à Madrid, à la dénommée Soultana Khaya, fausse militante des droits de l’homme, vraie agent des services algéro-séparatistes.
Sans utiliser des termes blessants, nous devons dire que le gouvernement Sanchez pèche par un manque patent de pragmatisme. Prisonnier d’une vision idéologique étriquée, de surcroît éculée, il veut gérer les affaires d’un État avec la mentalité du « militant ».
En un mot comme en mille, il y a maldonne dans la vision que « La Castille » se fait de son voisin du sud.
- JOURNALISTE-ÉCRIVAIN. AUTEUR DU LIVRE « MAROC-ESPAGNE: LE VOISINAGE PRUDENT ».