Le temps de la COVID a secoué l’univers de la culture en dévoilant cette fragilité propre au secteur culturel au Maroc. En effet, dire à un moment donné qu’on a une industrie culturelle est loin d’être une réalité au vrai sens du terme. Malgré l’émergence d’une résistance qui s’est cristallisée sous forme d’un concept nommé « résilience » en devenant l’emblème majeur de quelques têtes d’affiches de nos acteurs culturels afin de ne pas baisser les bras dans ce moment difficile où être ensemble est banni du paysage social.
Mais en dehors de cette note d’espoir, le champ de la désolation est immense. Beaucoup d’artistes ont perdu cette certitude d’être des êtres essentiels à ce monde. L’urgence économique a pris le devant en écrasant le sensible de la société, ce goût du beau qui apporte aux gens le bonheur de vivre. Cette expérience si douloureuse est le synonyme d’un oubli flagrant que notre société doit affronter comme révélateur d’un échec que nous devons analyser et lui apporter des réponses claires.
Il est temps d’asseoir une politique culturelle prenant en considération une approche systémique. Ainsi, le culturel doit être l’affaire de tous les secteurs en devenant un besoin vital. Ce désir de l’objet culturel doit passer en premier lieu par la petite enfance et l’école doit jouer son rôle de transmission et de sensibilisation à la culture. Les maisons de jeunes, les centres culturels de proximité seront des locomotives qui doivent accélérer ce processus d’intégration forte dans l’univers artistique. Créer une société qui consomme le produit cultuel est vital pour assurer la pérennité à ce secteur et faire valoir le travail de l’acteur culturel.
Pourquoi insister cette fois-ci sur le citoyen ? Car, il s’est avéré qu’au moment de la COVID que la voix de ce citoyen était terne, quasiment absente. Seuls les artistes ont manifesté leur désarroi en face d’une situation qui a bousculé les certitudes. Le public était absent, préoccupé par les urgences de la vie courante alors que la vie n’a pas besoin que des nourritures terrestres. André Gide, à travers son livre « Les nourritures terrestres », avait lancé un appel à l’éveil du sens et du désir d’une autre nourriture de l’ordre de l’artistique.
Cette expérience nous offre l’occasion de nous projeter dans un avenir plus radieux pour la culture au Maroc avec plus de clairvoyance et de conviction.