Inquiétudes occidentales face à la menace que représente « l’Axe du Chaos » (Algérie-Russie-Iran) pour l’Afrique et l’Europe (décryptage)

En une semaine (30 juin au 7 juillet 2023), nous avons constaté non sans intérêt la parution d’au moins trois articles édifiants dans des médiaux occidentaux sérieux sur la menace que représente ce qu’il est désormais appelé le « nouvel axe du chaos », représenté par la Russie, l’Algérie et l’Iran.

Le plus récente alerte a été donnée par Stephen Blank, chercheur principal à l’American Foreign Policy Council, dont les membres, des conservateurs, sont des spécialistes de la de la politique étrangère et de défense fournissant des informations aux membres du Congrès américain et du pouvoir exécutif. Dans un article paru le 7 juin courant dans les colonnes du quotidien américain The Hill, qui tire son nom du Capitol Hill où sont situées la plupart des institutions politiques fédérales américaines, Stephan Blank, spécialiste de l’idéologie de la Russie post-soviétique, se penche sur les répercussions mondiales et africaines du conflit russo-ukrainien, avec un focus l’Algérie, fer de lance de la nouvelle politique russe en Afrique. « Agression de la Russie en Ukraine a eu des répercussions mondiales, notamment en Afrique. Cela a fait prendre conscience aux décideurs politiques occidentaux de la nécessité de contrer la politique russe en Afrique », indique Stephen Blank, dans une tribune intitulée: « L’Algérie: le nouvel ami de Moscou en Afrique ».

Selon M. Blank, l’Algérie, voudrait utiliser l’ « arme » du gaz et sa « nouvelle importance géostratégique » pour tenter de nuire à l’intégrité territoriale du Maroc, « allié des Etats-Unis et, maintenant, un acheteur des armes israéliennes ». « Ce genre de défi régional est fait sur mesure pour Moscou, qui n’a cessé d’améliorer ses relations avec l’Algérie depuis plusieurs années en exploitant le conflit du Sahara occidental », explique-t-il.

« En effet, l’exploitation de telles rivalités ethno-territoriales est une longue tradition russe », estime Stephen Blank, en rappelant le voyage, mi-juin dernier, du président algérien, Abdelmajid Tebboune, à Moscou, malgré le blocus occidental imposé par l’Occident contre la Russie à cause de son offensive en Ukraine depuis février 2022. « Le partenariat croissant de l’Algérie avec la Russie a suscité l’ire des gouvernements occidentaux. La ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena Baerbock, a récemment exigé que l’Algérie dénonce la Russie comme agresseur contre l’Ukraine. De même, une lettre bipartite du Congrès américain  adressée au secrétaire d’État Antony Blinken en 2022 appelait à des sanctions contre l’Algérie en raison de ses accords d’armement avec la Russie. De même, le sénateur républicain Marco Rubio a appelé à l’action contre l’Algérie », a encore rappelé M. Blank.

Et d’ajouter: »les incursions de Moscou en Algérie et à travers elle dans le Sahel lui ont donné l’occasion non seulement de faire avancer son programme anti-occidental en Afrique, mais aussi de prétendre qu’il a plus de soutien international qu’il n’en a réellement pour sa guerre contre l’Ukraine.  En fin de compte, les objectifs de Moscou en Algérie et ailleurs en Afrique se traduisent par une quête de bases navales ou aériennes dans toute la Méditerranée et les eaux adjacentes, sans exclure l’Algérie. Outre le renforcement de l’influence russe dans les pays hôtes, leur objectif serait de dissuader l’OTAN, non seulement en mer Noire mais aussi en Méditerranée et au-delà ».

Maintenant, cap sur l’Europe, où un curieux sursaut de conscience quant au danger que représente l’axe Alger-Russie est en train de s’exprimer. Le 22 juin dernier, lors d’un point de presse conjoint avec son homologue algérien Ahmed Attaf à Berlin, la MAE allemande, Annalena Baerbock, a sommé son hôte algérien de nommer la Russie comme agresseur contre l’Ukraine. « Il faut appeler les choses par leur nom », a en effet martelé la cheffe de la diplomatie allemande.

Le 7 juillet 2003, la réplique a été donnée par deux prestigieux médias germanophones. Le quotidien belge à grand tirage « De TIJD »  a appelé les pays de l’Europe à renforcer leurs relations avec le Maroc et oeuvrer au règlement de la question du Sahara pour empêcher « les plans désastreux » résultant d’une collaboration « perfide » de ce qu’il appelle « le nouvel axe du chaos » qui déstabiliserait la région et constituerait « une menace directe pour la sécurité en Europe ». « Les évolutions en Algérie sont telles qu’il n’y a plus de place pour l’ambiguïté diplomatique », peut-on effet lire dans une tribune signée du politologue néerlandophone Fouad Gandoul, lsoulignant que « l’Europe doit choisir entre la realpolitik à court terme pour garantir l’approvisionnement en gaz et les principes fondamentaux pour assurer la stabilité et la sécurité à long terme en Europe et en Afrique du Nord ».

Toujours le 7 juillet, deux reporters de la radio bavaroise BR24, Sabina Wolf et Joseph Röhmel, avertissent contre les liens avérés entre la milice séparatiste du « Polisario » et Daech (acronyme arabe de « l’Etat islamique en Irak et en Syrie »). Dans un article publié dans le site de BR24, basée à Munich, expliquent comment les camps de Tindouf sont devenus un terreau propice pour le recrutement de jihadistes au profit d’Al Qaïda au Maghreb islamique « AQMI », rejeton de l’ancien Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC, produit pur jus de l’ex-Département du renseignement et de la sécurité, DRS, Algérie) et l’antenne sahélo-saharienne de Daech, « L’Etat islamique au Grand Sahara » (EIGS), fondé en 2015 par Adnane Abou Walid al-Sahraoui, ancien élément milicien du « polisario », tué en septembre 2021 dans un raid mené par les forces spéciales françaises dans la zone dite des trois frontières (Mali-Burkina, Niger). « Ces groupes ne se concentrent pas seulement sur la prise de contrôle de zones de la région, mais font tous toujours partie de cette stratégie globale, ce qui signifie que les attaques contre l’Occident sont une priorité », explique au média allemand le directeur principal de l’organisation internationale « Counter Extremism Project », Hans-Jakob Schindler.

La menace que représente cette liaison vérifiée entre AQMI et Daech et le mouvement séparatiste du « polisario » a été mise en évidence par la condamnation, le 22 mai 2023 en Espagne, à deux ans et demi de prison ferme, d’un cyber-activiste pro-« polisario » nommé « Ismaël », relève BR24, précisant que ce dernier était un partisan de l’émir sanguinaire de l’Etat islamique au Grand Sahara », Adnane Abou Walid al-Sahraoui.

Récapitulons: Soutien de l’Algérie à la Russie pour asseoir son hégémonie en Afrique, liens avérés entre AQMi et Daech avec le « polisario »… Reste le rôle des Mollahs d’Iran dans cette « stratégie du chaos » en Afrique et… l’Europe.

Passons sur l’implantation iranienne dans les camps de Tindouf, via son bras armé au sud-Liban, à l’origine de la rupture diplomatique le 1er mai 2018 entre Rabat et Téhéran. C’est un secret de polichinelle: L’Iran est bel et impliquée dans la formation militaire et l’équipement des miliciens du « polisario » en armement, notamment en drones suicide, avec la complicité évidence du régime militaire algérien. Et ce n’est surtout pas cette visite effectuée, pas plus tard qu’hier samedi à Téhéran, par le ministre algérien des Affaires étrangères, Ahmed Attaf, qui dira le contraire.

Sonné par la déclaration faite par le MAE iranien, Hossein Amirabdollahian, à l’occasion de l’Aid Al-Adha, où il affirmait que l’Iran était favorable à « des relations normales » avec le Maroc, la junte algérienne a dépêché hier son MAE dans la tentative de contrecarrer tout éventuel « rapprochement » entre Rabat et Téhéran, après la normalisation saoudo-iarneienne.

Mais que la junte algérienne se rassure: le Maroc n’est surtout pas dupe de la duplicité iranienne. Le Maroc ne peut en aucun cas serrer la main qui arme la milice séparatiste du « polisario ».