Lancement à Rabat des travaux de la 3ème Conférence Pair-à-Pair d’EUROMED Migration V

Le Programme EUROMED Migration V et le Centre International pour le Développement des Politiques Migratoires (ICMPD), en partenariat avec le Ministère des Affaires Etrangères, de la Coopération Africaine et des Marocains Résidant à l’Etranger, organisent, du 9 au 11 novembre 2022 à Rabat, la troisième Conférence Pair-à-Pair d’EUROMED Migration V sous le thème: « Les partenariats migratoires multilatéraux pour un développement durable dans la région euro-méditerranéenne.

La séance inaugurale de cette conférence a débuté ce mercredi 9 novembre à 9h00. À cette occasion, le Directeur Général des Relations Bilatérales et des Affaires Régionales au Ministère des Affaires Etrangères, de la Coopération Africaine et des Marocains Résidant à l’Etranger, Fouad M. Fouad YAZOUGH, a exposé les enjeux de cet important rendez-vous. Lecollimateur.ma reproduit in extenso son discours:

 

 

 

 

« Excellences, Mesdames et Messieurs,

Je suis très heureux de vous accueillir aujourd’hui à Rabat, à l’occasion de cette importante Conférence qui traite de la migration en relation avec le développement durable dans la région euro-méditerranéenne.

Je tiens, tout d’abord, à vous remercier, Monsieur le Directeur Général du Centre International pour le Développement des Politiques Migratoires (ICMPD), pour le choix du Maroc comme partenaire dans le cadre de l’organisation de cette Conférence et des autres rencontres programmées en parallèle portant sur la communication et les récits migratoires.

Je tiens, également, à vous féliciter ainsi que vos équipes pour votre engagement continu et votre contribution effective aux efforts internationaux en faveur d’une meilleure gestion de la question migratoire au bénéfice de tous.

Mes remerciements vont également à l’Union européenne, le partenaire distingué du Maroc, pour son appui financier à l’organisation de ces rencontres importantes dans le cadre du programme EUROMED Migration V. Ce soutien témoigne de l’intérêt qu’elle accorde aux échanges humains ; un volet essentiel du partenariat euro-méditerranéen.

Pourquoi le choix du Maroc pour abriter cette réunion ?

Je me réjouis, à cette occasion, du choix, loin d’être fortuit, du Maroc pour abriter cette Conférence, dédiée à une thématique très importante, toujours d’actualité et à la tête de nos agendas respectifs de coopération.

En effet, de par sa position géographique, le Maroc a depuis longtemps intégré la migration parmi ses priorités. Le Royaume est aujourd’hui un pays de départ, de transit mais aussi d’installation. Il a fait preuve d’engagement envers cette question au fil des années, aussi bien au niveau national, régional qu’international, et a démontré être un partenaire crédible et disposé à travailler dans un esprit de responsabilité et de solidarité sur les aspects migratoires avec l’ensemble de ses partenaires.

Au niveau national, le Royaume adopte, sous la Clairvoyance de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, Que Dieu l’Assiste, une politique migratoire basée sur deux stratégies nationales: la Stratégie Nationale d’Immigration et d’Asile (SNIA) et la Stratégie Nationale pour les Marocains Résidant à l’Etranger (SNMRE). Elles protègent les droits et libertés fondamentales aussi bien des Etrangers Résidant au Maroc que des Marocains Résidant à l’Etranger. Elles sont mises en œuvre en coopération et en coordination avec les pays voisins africains et européens, afin de faire en sorte que la migration depuis et vers le Maroc se déroule de la manière la plus sûre, la plus ordonnée, et la plus régulière possible, et de manière à réduire autant que possible les risques d’exploitation, de traite et d’abus.

Le Royaume est, également, engagé en faveur de la question migratoire dans la région euroméditerranéenne, aussi bien au niveau bilatéral, que dans les cadres régionaux, notamment l’Union pour la Méditerranée et le Dialogue 5+5. Ainsi, le Maroc est inscrit pleinement dans des dialogues structurés et profonds et des actions de coopération concrètes et multiformes avec l’Union européenne et plusieurs de ses Etats membres. Il a, par ailleurs, pris le lead dans l’organisation de plusieurs Conférences internationales, notamment la 8 ème Conférence Ministérielle du Dialogue 5+5 sur la Migration et le Développement, tenue à Marrakech en mars 2020, qui a adopté une feuille concrète et réaliste de route portant sur les différents aspects liés à la migration.

En outre, l’engagement du Maroc dans le cadre du Processus de Rabat se poursuit et se renforce, en témoigne sa future présidence, à partir de décembre prochain, dudit Processus.

Une Présidence durant laquelle le Maroc s’évertuera à préserver et à soutenir le momentum et la qualité des activités de ce Processus à travers la coordination pour la mise en œuvre d’un plan d’action élaboré via une approche concertée et globale du phénomène migratoire.

De surcroit, le Maroc est également un acteur éminent aux niveaux continental et international en la matière.

Sa Majesté le Roi Mohammed VI, que Dieu L’assiste, désigné par les Chefs d’Etats Africains comme Leader de l’Union Africaine sur la migration, a lancé l’Agenda Africain sur la Migration, dont l’une des propositions était la mise en place d’un Observatoire Africain de la Migration. Cet Observatoire inauguré en décembre 2020 à Rabat, vient de doter le continent africain d’un outil lui permettant de générer une meilleure connaissance, compréhension et maitrise du phénomène migratoire et de développer la collecte, l’analyse et l’échange de données entre les pays africains. Il contribuera de manière substantielle à une meilleure compréhension des tendances migratoires au niveau africain et au-delà.

Concernant son engagement international, le Maroc a soutenu depuis longtemps l’élaboration d’un cadre de gouvernance internationale de la migration. Il participe activement aux travaux du Forum Mondial sur la Migration et le Développement, dont il a assuré la coprésidence avec l’Allemagne en 2017-2018. Il a accueilli, sur ses terres, en décembre 2018, la Conférence intergouvernementale pour adopter le Pacte de Marrakech pour des migrations sûres, ordonnées et régulières. Et en tant que pays champion de la mise en œuvre de ce Pacte sur la migration, le Maroc continue sans relâche son action pour la concrétisation des 23 objectifs dudit Pacte à tous les niveaux et en particulier dans les régions de son appartenance.

C’est dans cet esprit qu’il accueille aujourd’hui cette réunion euro-méditerranéenne. Le Maroc a, également, abrité la Réunion Ministérielle des pays champions de la mise en œuvre du Pacte Mondial le 24 mars 2022. Cette réunion a offert au groupe des pays champions de la mise en œuvre du Pacte l’occasion de se réunir, d’échanger et de discuter d’une approche commune et concertée quant à l’éminente contribution de notre groupe au premier Forum d’Examen des Migrations Internationales (IMRF), où le Maroc a présenté 35 bonnes pratiques de la mise en œuvre du Pacte de Marrakech.

Conscient de l’importance du nexus environnement, changement climatique et migration, et dans le cadre de la 27ème Conférence des parties (COP 27), le Royaume soutient des projets pilotes de l’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM), notamment le projet « lien entre la migration, l’environnement et le changement climatique (MECC) », qui vise le  renforcement des capacités du gouvernement marocain sur le nexus MECC, dans le but d’atténuer les causes profondes des déplacements forcés et favoriser la résilience des communautés au changement climatique.

C’est ainsi que nous pouvons réaffirmer le bien-fondé du choix du Maroc pour abriter cette importante Conférence.

La Méditerranée: une région avec pleines d’opportunités

Excellences, Mesdames et Messieurs,

Le Maroc a adhéré pleinement à l’initiative de l’ICMPD car elle place la Méditerranée au centre de la discussion sur la migration dans un contexte certes difficile mais qui offre des occasions inespérées aux pays de la région. La Méditerranée a certainement son mot à dire au moment où les lignes géopolitiques bougent et les priorités se redessinent.

Comme vous le savez, l’espace euro-méditerranéen est doté d’un héritage historique millénaire, d’une diversité culturelle hors pairs, de ressources riches et diversifiées ainsi que d’un potentiel économique et humain considérable. En plus, il dispose de cadres de dialogue structurés et de partenariats multiformes de longue date qui ont engrangé des acquis indéniables dans divers domaines.

Je suis convaincu que la Méditerranée, forte de ses nombreux atouts, saura relever les défis globaux auxquels fait face la région, notamment géopolitiques, économiques, énergétiques, alimentaires, climatiques, sécuritaires et aussi migratoires ; ces défis qui se sont aggravés par la crise sanitaire, qui ne semble pas encore totalement dépassée, et surtout par la crise ukrainienne qui a bouleversé l’agenda régional.

Il est vrai que cet espace connait des inégalités de développement entre les deux rives de la Méditerranée. Il est vrai aussi que les efforts menés jusqu’à présent n’ont pas permis de réduire ce Gap et de réaliser l’intégration économique, commercial, scientifique et culturel espérée. Ces mêmes efforts n’ont malheureusement pas pu à ce jour démystifier les stéréotypes erronés sur la migration entre les deux rives de la Méditerranée et profiter pleinement de son potentiel important. Bien au contraire, il est constaté que de nouvelles contraintes sont de plus en plus imposées alors même que la mobilité humaine est un élément clé pour la réussite de l’œuvre euro-méditerranéenne.

On peut comprendre que la migration entre les deux rives de la Méditerranée, aussi naturelle qu’elle l’était au fil des années, s’est progressivement transformée et relativement accentuée sous la pression des crises socio-économiques, des conflits armés, du réchauffement climatique et de la pénurie de l’eau.

Toutefois, les échanges humains demeurent à nos yeux une chance, une opportunité et un potentiel porteur d’avenir à nos sociétés respectives. Il convient ainsi de mettre en valeur l’apport positif que constitue la migration, d’un point de vue économique tout d’abord. Ce sont souvent des populations jeunes, éduquées et formées qui répondent à une demande de travail non remplie par le marché local. Mais les migrants contribuent aussi à l’enrichissement culturel des sociétés d’accueil, ils apportent des idées nouvelles, de nouvelles manières de faire, une volonté de réussir. Tout cela contribue au dynamisme de la société.

Donc, il est temps d’agir en faveur des migrations sûres, ordonnées, régulières et bénéfiques pour tous. Il est temps d’inverser la tendance, et de mettre fin à la perception négative installée à tort dans notre région.

Je vous invite à travailler ensemble sur un agenda positif commun en considérant la question migratoire comme un levier de développement et non comme un obstacle, comme une chance et non comme un danger.

La Méditerranée: leader de la mise en œuvre du Pacte de Marrakech

Excellences, Mesdames et Messieurs,

Ce ne sont pas les déclarations ni les Plans d’actions qui manquent. Nous avons tout ce qu’il faut et bien évidement les objectifs de notre Pacte Mondial de Marrakech sont là pour guider nos actions.

Je vous invite à faire de cette réunion un moment important pour positionner la Méditerranée comme une « région championne » de la mise en œuvre du Pacte.

Je me réjouis que la migration régulière soit mise en avant dans les travaux de cette réunion. La démarche inclusive basée sur la concertation et la prise en compte des intérêts mutuels est nécessaire à cet égard.

Le Partenariat euro-méditerranéen gagnerait si la région est érigée comme un modèle de coopération en matière de migration légale. Les actions suivantes pourraient être réalisées dans l’intérêt de tous:

• La production de données précises et fiables pour orienter et renforcer nos politiques respectives en la matière. La mise en réseau de nos Institutions spécialisées est à encourager pour travailler ensemble sur cet aspect très important et l’Observatoire Africain des Migrations peut à ce titre jouer pleinement son rôle à cet égard.

• Le partage de l’information sur les possibilités de la migration régulière et des meilleures pratiques dans l’intérêt des pays d’origine et d’accueil et au bénéfice des migrants. La mise en relation des agences nationales de promotion de l’emploi et la conclusion d’accords de migration sont à promouvoir.

• L’investissement dans les formations adaptées aux besoins des partenaires et le perfectionnement des compétences. La multiplication des accords interuniversitaires pour les doubles diplomations et la facilitation de la reconnaissance mutuelle des diplômes sont à favoriser. L’Université Euromed de Fès peut lancer une réflexion académique impliquant les universités de la région et présenter des recommandations à ce sujet.

• La promotion d’un discours positif sur la migration à travers la multiplication des débats publics fondés sur l’analyse des faits avec l’implication des acteurs médiatiques. L’intégration de la migration dans les programmes de formations des acteurs médiatiques est nécessaire.

Le contexte actuel semble favorable à la concrétisation de ces actions surtout avec le lien de plus en plus important et visible entre les besoins en compétences et l’évolution des  politiques en matière des énergies renouvelables, de transition écologique et numérique, de nouvelles technologies et du climat.

De nombreuses opportunités s’offrent, notamment à la faveur d’une demande de main d’œuvre qualifiée susceptible d’évoluer grâce à la mise en place de modèles économiques basés sur le développement durable, et à la mise en place d’instruments novateurs tels que le Partenariat des talents de l’Union Européenne qui privilégie une approche concertée.

Une migration légale bénéfique pour l’Afrique

Excellences, Mesdames et Messieurs,

Il est important de faire en sorte à ce que cette rencontre puisse contribuer pleinement à la mise en œuvre des conclusions en la matière du Dialogue 5+5, des processus de Rabat et de Khartoum ainsi que du Partenariat entre les continents africain et européen. A travers cette démarche, le lien entre la Méditerranée et le continent africain sera présent et permettra aux politiques migratoires méditerranéennes d’intégrer la profondeur africaine, et la dimension euro-africaine, dimension indispensable pour la gestion des flux migratoires entre les deux Continents.

Dans ce cadre, l’Afrique peut bénéficier de ces liens et des partenariats migratoires multilatéraux. Ces derniers peuvent jouer un rôle très important dans le renforcement du développement humain du Continent, à travers le transfert de compétences depuis les pays d’accueil ainsi que la consolidation des investissements réalisés par les migrants au niveau de leurs pays d’origine, favorisant ainsi la création d’emploi et le développement économique de leurs pays.

Il est nécessaire de favoriser la coopération Sud-Sud et la coopération triangulaire pour assurer le succès escompté pour une gestion singulière et novatrice de la migration régulière.

Des initiatives comme le projet pilote Link-Up Africa impliquant l’Agence Marocaine de Coopération Internationale (AMCI), l’Union Européenne et l’Agence belge de développement (ENABEL) favorisant le travail des jeunes sont à multiplier.

Excellences, Mesdames et Messieurs,

Je voudrais terminer ce mot introductif en réaffirmant la centralité de la question migratoire pour le Maroc, pour l’espace euro-méditerranéen, mais aussi pour l’espace euro-africain. Qui dit migration dit opportunité, et qui dit opportunité dit avenir commun où cet aspect a toute sa légitimité pour être au centre de nos agendas et actions, présentes et à venir.

Dans ce cadre, vos travaux, échanges, recommandations et conclusions sont attendus et seront une source d’inspiration pour la région afin de piloter ce dossier avec l’enthousiasme, la responsabilité et l’engagement qu’il faut par l’ensemble des intervenants.

Je vous remercie ».