Nous avons assisté ces derniers temps, à plusieurs mobilisations menées par des acteurs culturels, des activistes et des citoyens éclairés pour préserver des lieux culturels en l’occurrence les salles de cinéma. Cette action est tout à fait louable car elle exprime un état d’esprit qui s’est installé dans notre paysage culturel et une conscience citoyenne qui a pris en charge la préservation de la mémoire.
A ce titre, il faudrait saluer le travail de l’association Casa-Mémoire qui a accompli un travail colossal pour sauver des joyeux de l’architecture surtout le patrimoine architectural qu’on a hérité de la période du protectorat. Il me semble que la duplication de cette forme de mobilisation doit être généralisée dans toutes nos villes car la spéculation immobilière est une machine infernale insensible au beau, au souvenir et à la mémoire.
On pèse – tout à fait – l’ampleur de ce mouvement qui fait barrage à l’effacement et à l’installation d’autres structures qui flirtent avec le business. Néanmoins, cette initiative doit être consolidée par un travail de fond animé par une réflexion donnant lieu à des perspectives radieuses. Car, après avoir crié victoire en sauvant des monuments et en les classant dans la case des « Monuments historiques » de la ville, il y a un silence qui s’est installé. Le lieu est désormais légué à un silence inouï et à une solitude sans nom. Il devient par excellence un espace oublié et voué à la déchéance. Ce qui résulte de cette mobilisation c’est le statut quo. « Laisser le temps au temps » – comme disait Mitterrand – pour maintenir une espèce de guerre froide où personne n’est gagnante.
Il est impératif de trouver un terrain d’entente avec les décideurs de la ville et les propriétaires de ces lieux pour débloquer cette situation absurde. Cette dernière est le vrai théâtre d’une satisfaction des activistes d’avoir réussi à préserver ce lieu, qui est censé être transformé en un bien immobilier par les propriétaires et les décideurs de la ville qui appliquent la loi, pour arrêter le processus sans déployer les moyens susceptibles de transformer ce monument en un lieu vivant.
Cette situation nous a rappelé une anecdote liée au passage à feu Tayeb Seddiki à Fès quand il a remarqué que le projet de construction du complexe culturel Al Houria est toujours à l’étape d’un chantier depuis 12 ans. Il s’est prononcé avec son humour grinçant devant quelques personnes présentes à ce moment: « Vous avez à Fès beaucoup de monuments historiques et voilà un monument hystérique qui s’ajoute à ce répertoire de la ville de Fès ».
C’est le cas de le dire, puisque nous sommes incapables d’imaginer une suite à donner. Plusieurs pistes à creuser comme l’achat par la ville de ces lieux tout en les mettant à la disposition des fondations qui œuvrent dans le domaine culturel et artistique avec un cahier de charges bien précis. Faire valoir le potentiel de ces lieux comme des espaces de proximité pouvant accueillir des jeunes dans le cadre de l’Initiative Nationale pour le Développement Humain. Cela dit, avec un peu d’imagination et de bonne volonté nous pouvons passer à l’étape suivante de la mobilisation pour rendre la vie à ces monuments qui font appel à la grâce d’une seconde vie.