Dans ce qui s’apparente à une distribution des rôles, nous avons eu droit hier samedi 12 décembre à deux déclarations simultanées du Parti justice et développement (PJD, au pouvoir) et son aile prédicatrice, le Mouvement unicité et réforme (MUR), concernant la décision du Roi Mohammed VI de rétablir les relations diplomatiques entre le Maroc et Israël. Si le parti islamiste a adopté dans cette déclaration un ton moins virulent, se contentant d’une piqûre de rappel sur « l’occupation sioniste et les crimes commis contre le peuple palestinien, les meurtres, les déplacements et les agressions contre les lieux saints en particulier les attaques contre la mosquée Al-Aqsa »… le MUR, lui, a versé dans l’ostracisme pur et dur en considérant que « les mesures prises par le Maroc qui préside le comité Al-Qods constituent une évolution regrettable et une mesure inacceptable qui va à l’encontre de l’appui ferme et honorable du Maroc à la cause palestinienne ».
Le bal de ces tris croisés a été ouvert vendredi par la jeunesse PJD, qui avait exprimé son « rejet de la normalisation avec l’occupation sioniste usurpatrice et la justification de ses crimes envers le peuple palestinien opprimé et les terres occupées en Palestine ».
À toutes fins utiles, il faut préciser que nous n’avons nullement l’idée de contester le droit de quiconque à exprimer son opinion, lequel est d’ailleurs consacré par la Constitution et la plus haute autorité du Royaume. Néanmoins, le combat pour les droits palestiniens inaliénables n’est pas le monopole du PJD, de sa jeunesse ou encore son bras idéologique, le MUR; le Maroc, Roi, gouvernement et peuple, s’est toujours rangé aux côtés du peuple palestinien frère pour défendre son droit à recouvrer sa liberté et ses terres injustement spoliés et occupés par l’État israélien.
Seulement voilà, la sortie du PJD, de sa jeunesse et de son bras idéologique interpelle par son timing, le contexte extrêmement sensible par lequel passe la question du Sahara marocain qui, comme l’avait souligné le Roi à maintes reprises, est une question « existentielle » pour tous les Marocains, de la même manière que l’est la question palestinienne pour les Palestiniens mais aussi… pour les Marocains.
Le Souverain a d’ailleurs été on ne peut plus clair en précisant, jeudi 10 décembre, lors de son entretien téléphonique avec le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, que « le Maroc place toujours la question palestinienne au même rang de la question du Sahara » et que « l’action du Royaume pour consacrer sa marocanité ne se fera jamais, ni aujourd’hui ni dans l’avenir, au détriment de la lutte du peuple palestinien pour ses droits légitimes ».
Était-il nécessaire que le PJD au pouvoir, après cet engagement solennel et ferme du Souverain, se manifeste et ressasse des slogans qui n’ont d’ailleurs jamais fait bouger des lignes ni changé quoi que ce soit dans le très long processus du combat pour la Palestine? N’était-il pas temps d’explorer une autre voie que celle des appels incessants et néanmoins inefficaces à la poursuite du « boycott »?
Il est curieux de constater que les inconditionnels du « boycott », dont le PJD, continuent de se cramponner à cette posture quoi que cette dernière ait déjà montré ses limites, démontré son inefficacité et son incapacité à faire avancer le dossier palestinien.
Mais passons, car le PJD est au pouvoir et, de ce fait, ne peut se permettre de « chanter hors-scène » sans risquer de compromettre les intérêts de son pays à leur tête son intégrité territoriale et, par voie de conséquence, ceux de la question palestinienne qui, précisons-le encore une fois, n’est pas une question de slogans rabâchés à tout-va.
La question palestinienne est assez sensible pour la réduire à une simple question de slogans et… de manifestations du dimanche.
Le Maroc qui compte la communauté juive la plus forte et la plus influente en Israël a désormais une carte stratégique à jouer, en rouvrant les canaux de communication officielle avec les dirigeants israéliens, pour mieux défendre les droits palestiniens et la paix au Proche-Orient en général.