
Par: Reda Jaali
Chaque été, Saïdia revêt ses habits de lumière. Touristes, MRE, concerts, restaurants bondés, plages pleines à craquer… La « Perle bleue » devient méconnaissable tant elle regorge de vie. Pourtant, dès les premières semaines de septembre, tout s’éteint. Rideaux baissés, rues désertes, hôtels vides. Le contraste est saisissant, presque cruel. Peut-on continuer à accepter qu’une ville aussi belle ne vive que deux mois par an ?
À l’origine de ce phénomène : une dépendance totale au tourisme balnéaire saisonnier. Commerçants et professionnels tentent de réaliser, en juillet-août, un chiffre d’affaires censé compenser dix mois d’inactivité. Résultat : des prix exorbitants, qui font fuir de plus en plus de familles. Cet été encore, une simple bouteille d’eau minérale de 0,5 litre a pu atteindre 30 dirhams dans certains cafés de la corniche ! Inacceptable. Et surtout, insoutenable.
Pour sortir de ce modèle étouffant, une piste s’impose : faire de Saïdia une ville universitaire, et investir dans l’enseignement supérieur comme levier de développement territorial. À l’image de Martil ou d’Ifrane, un pôle académique dans l’Oriental, en lien avec la Charte de l’investissement Maroc et les opportunités d’investissement au Maroc, pourrait redonner vie à la ville.
Il ne s’agirait pas seulement d’y construire une antenne universitaire, mais de développer un véritable parc éducatif et technologique, avec campus public, établissements privés, bibliothèques, espaces culturels et incubateurs.
Un tel projet s’inscrirait pleinement dans la dynamique du Plan d’Accélération Industrielle (PAI) et dans l’esprit de la nouvelle Loi sur l’investissement Maroc 2023/2024, qui encourage les projets structurants à fort impact territorial. Il permettrait également de valoriser le foncier et l’immobilier local, attirant de nouveaux investisseurs dans les services ou la restauration.
Ce pôle permettrait à la ville de :
- Vivre toute l’année grâce à une population étudiante permanente,
- Attirer des investissements durables dans l’économie locale,
- Faire baisser les prix, en stimulant une économie répartie sur 12 mois et non concentrée sur l’été,
- Mobiliser les dispositifs incitatifs prévus pour les zones prioritaires,
- Et surtout, reconnecter Saïdia à la dynamique régionale impulsée depuis 2003 par l’Initiative Royale pour le Développement de la Région de l’Oriental.
Les investisseurs trouveraient ici un cadre attractif, avec le soutien du CRI Maroc, de l’AMDIE, ou encore du Fonds Mohammed VI pour l’investissement, sans oublier les avantages fiscaux pour les zones touristiques et industrielles comme le Parc industriel d’Oujda, tout proche.
Et les premiers bénéficiaires d’un tel projet seraient aussi les habitants eux-mêmes. Même ceux qui louent leurs appartements uniquement en été pourraient désormais les rentabiliser toute l’année en les proposant aux étudiants. Une source de revenu régulière et plus stable, qui profiterait aux propriétaires tout en soulageant la pression locative estivale.
Pourquoi ne pas imaginer ici une université privée de référence, sur le modèle de l’UM6P de Benguerir, de l’Université Al Akhawayn à Ifrane, ou d’un partenariat international avec des établissements européens ou africains ? Investir dans le capital humain, c’est aussi investir au Maroc de demain.
Saïdia ne mérite pas d’être une ville fantôme dix mois par an. Elle peut devenir un centre de savoir, de culture et d’innovation. Il suffit de le vouloir.





